M FRANÇOIS ALBERT
M. François Albert est né le 4 avril 1877, à Bordeaux, d'une vieille famille poitevine. Ancien élève de l'École Normale supérieure, professeur, journaliste, il fut élu sénateur la Vienne en janvier 1920. Inscrit au groupe de la Gauche démocratique radicale et radicale-socialiste, il a été choisi comme Ministre de I'Instruction Publique par M. Herriot. Il est admis que si le Président du Conseil, qui a toujours été un garçon sérieux, n'avait retenu que les espiègleries de cet enfant terrible qui faisait le désespoir de ses maîtres de la rue d'Ulm, il naurait jamais confié la rue de Grenelle son ancien camarade. Il a fait ce choix parce qu sait que M. François Albert est un esprit cultivé, primesautier peu paradoxal peut-être mais ayant de l'idée. Il traite les questions plus graves sur ton plaisant mais sait ce qu'il veut. Quandle jeune ministre fit sa véritable entrée dans monde politique lors discussion du budget de l'instruction publique, en voyant à la tribune ce blondinet, mince, fluet, le toupet en bataille, d'aucuns souriaient. Il paraissait tellement petit ! Quelques instants après, sa parole chaude, nette, véhémente avait conquis tout le monde ou presque et on l'acclamait. Arrivé avec une réputation jacobin, on attendait son premier discours avec impatience. Ce fut d'ailleurs tournoi littraire intressant que ce duel entre les deux athéniens qui ont nom François Albert et Léon Bérard auxquels vint s'ajouter - tout naturellement - Georges Leygues, troisième larron. Ce fut d'abord de part et d'autre une débauche d'esprit qui amusa beaucoup la galerie. M. Léon Bérard ne se fit pas faute de faire montre du sien. Il en tellement. (M. Poincaré estime qu'il en a trop. M. Leygues fut plus péremptoire et s'attacha à prouver dans un langage élégant que "sans Rome et sans Athène, on ne peut apprendre à bien vivre et à bien mourir." Tous les noms connus furent successivement invoqués selon que l'on était adversaire ou partisan de la culture gréco-latine. M. François Albert expliqua sa réforme au sujet des décrets de 1902 et se défendit largement d'avoir fait le coupdu père François. Envisageant ensuite les questions universitaires à l'ordre du jour - en un discours ramassé auquel le Temps lui-même n'a reproché que la mesure de l'argumentation - le Ministre de l'Instruction publique promit de les résoudre avec tout son coeur et toute énergie, n'oubliant pas que le Ministère qu'il détient n'est pas seulement technique et social, mais aussi politique. Des bravos chaleureux jaillirent sur toutes les travées de gauche à l'adresse du défenseur de la laïcité républicaine. M. le Ministre n'a pas encore dépouillé le vieil homme, je veux dire la fougue du polémiste d'hier. Cela viendra. Cela vient toujours quand on est au pouvoir où il faut concilier les rêves d'antan et les aspirations de plus en plus ascendantes de la démocratie. M. François Albert s'adaptera, parce que c'est politique et humain.