Procès Vaubulon
Plaintes des habitants
Antoine ROYER
2.084
Déclaration faite par le Sieur Antoine
ROYER natif de Bransion en Bourgogne et âgé
d'environ cinquante ans, maître chirurgien et habitant
du quartier de Ste Suzanne, Ile Bourbon, contre
Monsieur HABERT de VAUBOULON Gouverneur de la dite
Ile
Du 21 Décembre 1690
Disant que Sa majesté ayant eu la bonté d'écrire
une lettre aux dits habitants par laquelle Elle leur
marquait qu'Elle voulait prendre soin d'eux et les
soulager et leur envoyait pour cet effet le dit Sieur
de VAUBOULON pour leur Gouverneur, lequel bien
loin de les soulager, aurait commencé de leur
vendre leur habitations, lesquelles ils avaient
ci-devant achetées ou faites par leurs travaux
avec des menaces d'envoyer chez eux les piller s'ils
contredisaient à ce qu'il prétendait, en ayant même
fait mettre plusieurs dans le cachot.
Déclare de plus le dit Sieur ROYER qu'ayant appris que le dit Sieur
Gouverneur était pour rendre justice dans l'ile
il lui avait représenté quelques papiers comme il avait
toujours servi la Compagnie en qualité de chirurgien
et plusieurs autres occupations pour le dit service
dont il n'aurait point été satisfait de quoi le dit Sieur
Gouverneur n'a tenu aucun compte, y ayant mis le Sieur
LEROY son chirurgien pour traiter les malades de l'Ile,
dont le dit Sieur ROYER lui remontra qu'il était obligé
de labourer la terre pour vivre avec sa famille,
dont le dit Sieur Gouverneur fut assez téméraire de n'y faire
aucune réfection
Signé ROYER
2.085
Déclare de plus le dit Sieur ROYER, que le dit Sieur Gouverneur
l'aurait fort pressé de lui rendre l'argent d'une
habitation qu'il avait vendue du temps du Sieur
DROUILLARD en ayant la permission, le dit Sieur DROUILLARD
l'ayant obligé de s'en défaire pour aller faire valoir
l'habitation du Roi à Ste Suzanne et commander
les nègres qui étaient dans le service, de quoi le dit
Sieur de VAUBOULON n'aurait voulu prendre aucune
connaissance, continuant toujours de le presser de lui
rendre le dit argent.
Déclare de plus que le dit Sieur Gouverneur lui a fait
payer dix écus pour le fonds de son habitation,
lui ayant fait prendre un contrat par lequel
il s'obligeait de lui payer tous les ans pour rente
six coq d'Indes, deux cochons, et cent livres de riz,
avec quatre écus pour avoir fait mettre deux fers
aux pieds d'un de ses nègres.
Déclare de plus que le Sieur FIRELIN, Commis de la Compagnie,
se serait retiré au quartier de Ste Suzanne pour
éviter les violences du dit Sieur Gouverneur, ayant été mal
traité de lui dans le magasin de la Compagnie, ainsi
qu'il en fit sa déclaration aux habitants du quartier
en sortant de la messe, ayant même fait voir sa joue
qui était enflée et meurtrie, ce que voyant le dit Sieur
déclarant lui aurait fait offre de sa maison, ce que le dit
FIRELIN accorda et après le dit Sieur Gouverneur l'ayant appris
aurait écrit au dit Sieur déclarant avec ordre expresse
de dire au dit FIRELIN de s'en retourner à St Denis,
et que s'il en faisait difficulté de le faire conduire
pieds et main liées, ensuite de quoi le dit Sieur Gouverneur
lui fit de grands reproches de ce qu'il avait retiré
un homme de chez lui qui lui contredisait disant que
c'était un petit coquin, un petit fripon et un
misérable.
Signé ROYER
2.086
43
Déclare de plus avoir entendu plusieurs fois
le dit Sieur Gouverneur parler fort mal de Messieurs
de la Compagnie, les traitant de coquins et de
misérables, ne les connaissant en rien, et disant
que ces Messieurs les Directeurs de Surate ayant
appris de Monsieur HOUSSAYE qu'il était dans
l'ile ne lui avaient rien envoyé, et en faisant
des mépris à son ordinaire disant qu'il ne se souciait
non plus d'eux que de la boue de ses souliers
et qui connaissait pas ce que ces messieurs lui
avaient fait espérer dans leur bureau à Paris,
l'ayant fait mettre dans un fauteuil élevé à leur
tête, étant tous le chapeau bas devant lui en
le suppliant d'avoir soin de leur intérêts.
Déclare de plus avoir entendu le dit Sieur Gouverneur dire
au Sieur CALVE Lieutenant du navire Les Jeux qu'il
ne se mêlait point du tout du magasin, mais que si
le Commis faisait quelque chose contre les
intérêts de la Compagnie, il y tiendrait la main
ainsi qu'ils l'en avaient prié.
Déclare de plus que le dit Sieur de CHAUVIGNY voyant
tout ce que le dit Sieur Gouverneur faisait aux dits habitants
dit au Sieur déclarant que c'était un bougre de [ f......]
et qu'avant peu de temps ils verraient bien des
affaires et choses que la prudence l'obligeait
de se taire.
Déclare de plus voyant que le dit Sieur de Chauvigny tolérait
les affaires envers le dit Sieur Gouverneur, le dit Sieur déclarant
lui aurait fait présent de quelques toiles fines des Indes,
lequel voulant lui rendre la réciproque, lui aurait
fait présent de couteaux, ciseaux, et peignes venant
du magasin de la Compagnie
Signé ROYER
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