Procès Vaubulon

Réquisitoire de BÉCHAMEIL, avocat de Michel FIRELIN

2.300
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				Monseigneur,

Monseigneur, de BECHAMEIL
Chevalier Marquis de
NOINTEL, conseiller du Roi
en ses Conseils, Maître des
requêtes ordinaire de Son Hôtel,
Commissaire départi par Sa
Majesté pour l'exécution de ses 
Ordres en Bretagne


		Messieurs les Juges
Présidiaux de Rennes

Supplie humblement Michel FIRELIN ci-
devant Commis pour la Royale Compagnie

2.301 des Indes orientales en l'Ile de Bourbon, défendeur et accusé, et aussi le Père Hyacinthe de Quimper, religieux capucin, Robert DU HAL, LA ROCHE, Jacques BARRIÈRE, Marc VIDOT, défendeurs et accusés, contre Monsr le Procureur du Roi audit Siège Présidial de Rennes, instructeur et accusateur en exécution d'arrêt du Conseil d'Etat du 23e avril 1697, et des ordonnances de Mondit Seigneur de NOINTEL, du 24e avril 1697, Disant que si lesdits accusés étaient jugés par la qualité des crimes qu'on leur impose, l'innocence du suppliant aurait grand sujet d'être alarmée, étant accusé, et autres, d'avoir violemment fait emprisonner le Sieur de VAUBOULON HABERT, Gouverneur de l'Ile Bourbon, l'avoir mis dans un cachot et l'y avoir fait mourir, et aussi d'avoir fait fusiller son valet de chambre, le suppliant n'est coupable que parce que ses ennemis le veulent rendre pour se décharger. Ils ont eu l'adresse de faire tomber leur mémoire entre les mains de la Justice
2.302 pour ne pas paraître les véritables parties et autres au temps desdits faits qu'on leur impose, dont on espère que la souveraine prudence de la Justice apportera tout le soin et l'instruction possible pour découvrir la vérité de l'innocence du suppliant, sans rien donner à la préoccupation, ni ayant de conjoncture ou la crainte de verser du sang innocent doit être redoublé qu'en cette sorte et nature d'accusation. Mais la vie de l'Homme est trop précieuse pour la sacrifier sur de faux bruits, et rapporter que le mensonge, l'imposture et la calomnie par souvent élève par d'injustes haines déguisées pour perdre des innocents. C'est par ces motifs injustes que le suppliant se trouve compris dans cette accusation dont il est innocent et n'espère pas qu'il se trouve chargé desdits faits dont ils sont accusés, et dont il n'est capable. Le suppliant ayant eu l'honneur d'être nommé et choisi par messieurs les Directeurs Généraux de la Royale Compagnie des Indes
2.303 Orientales, reçut leurs Ordres pour ladite Ile de Bourbon le 26e mars 1689 et le 18 avril même an, tant à Paris qu'à Lorient, et fit le voyage en compagnie du Sieur de VAUBOULON envoyé pour Gouverneur de cette Ile, et du Sieur de CHAUVIGNY, et aussi dudit Révérend Père Hyacinthe de Quimper et du Frère Anthoine de Lannion son compagnon, et le Père Bernardin, capucin, faisant aussi le même voyage, et autres en vaisseaux différents et de même Compagnie, Mais environ quinze jours de temps de l'embarquement, le décès du Père Bernardin étant arrivé, le Père Hyacinthe envoya le Frère Anthoine demander au Capitaine le coffre dudit Bernardin, prétendant qu'il lui appartenait, et au contraire, le dit sieur de VAUBOULON et le Capitaine voulurent qu'il eût été fait ouverture de ce coffre pour voir ce qui était dedans, prétendant aussi que les trois cents livres que le Père Bernardin avait reçues du Roi devaient être mises entre les mains dudit Sieur Gouverneur, avec lequel ledit Père Hyacinthe avait eu plusieurs paroles animées et d'aigreur, et continuèrent de se piquer de paroles
2.304 et de se faire des distinctions et contestations, ledit Sieur Gouverneur prenant des hauteurs, ces bons religieux étant arrivés au Brésil, ayant mis pied à terre, allèrent dans leur couvent qui est établi, pour faire des plaintes à leur Provincial, et témoigner qu'ils ne voulaient pas se rembarquer, mais le Provincial ayant parlé audit Sieur Gouverneur, et après des exhortations de bien vivre ensemble, ils se rembarquèrent, sans le Père Hyacinthe avoir changé d'esprit, car ils recommencèrent à se faire des difficultés, contestations et querelles, leur esprit étant contraire, et le Père Hyacinthe prétendait qu'il n'avait d'autorité sur lui et qu'il en avait plus que le Gouverneur, et autres paroles, en quoi le suppliant n'eut aucune part; aussi cela ne regardait sa Commission qu'il exécuta avec toute l'assiduité et la diligence et la fidélité possibles pour le profit de la Compagnie dont ledit Sieur Gouverneur était dans ledit commencement fort satisfait, et aussi les habitants
2.305 Monsieur le gouverneur connaissant sa fidélité, expérience, et les bonnes moeurs , l'honora du mandement de Procureur du Roi le 29e xbre 1689 et de ses ordres par ses lettres, étant pour faire des information que autres causes y exprimées, qu'il a représentées à Monsieur de La RIVIÈRE CHEREIL et sont jointes au procès desdits mois de janvier 1690 et autres dates. Par ces lettres, il se voit qu'il lui envoyait des ordres d'antidates qui lui devaient revenir, du profit de cette Commission, qu'il priait le Père Hyacinthe de confesser celui qu'il ordonnait être pris par l'exécuteur, qu'il y avait des femmes qui l'avaient injurié, que fallait faire leur procès, et à la femme de RICQUEBOURG, et faire un exemple desdites femmes, et de savoir à qui elles avaient ordonné de le tuer, entre autres par la lettre du 6 juin 1690. Par celle du quinzième, comme il se faisait des plaintes par les habitants, il marqua qu'il était bien aise qu'il y avait qui ne se plaignaient du peu de fond qu'on leur faisait
2.306 mais que dans la suite il(s) seraient punis ceux qui se plaindraient comme rebelles et séditieux, ne permettant pas de se plaindre des exactions qu'il faisait sur le public. Ledit Gouverneur, sur quelques rapports qui devaient avoir été faits contre la conduite du suppliant, lui donna une attestation et certificat le premier août 1690, que le suppliant avait dignement rempli lesdites fonctions de sa Commission en homme de bien, et suivant lesdits ordres de la Compagnie. Cette pièce est aussi au procès. Le sieur de CHAUVIGNY, quoique grand ami et favori dudit sieur Gouverneur, écrivit dans une lettre à Monsieur ROGNES, l'un des Directeurs de la Compagnie, le 12 7bre 1690, marquant que le suppliant faisait son devoir, mais qu'il était malheureux d'être tombé entre les mains d'un homme qui lui liait les siennes, si étroitement que le suppliant ne pouvait pas faire comme il voudrait bien pour l'avantage
2.307 de la Compagnie, cependant qu'il fallait lui faire faire justice, et ledit Sieur Gouverneur ne laissait pas d'écrire au suppliant les 8 et 10 7bre par les lettres qui sont au procès, ce qui justifie sa bonne conduite, et qu'il vivait bien avec son Gouverneur. Ledit Sieur de CHAUVIGNY se retirant écrivit audit sieur de VAUBOULON le même jour 12e 7bre en des termes sensibles et injurieux. D'un autre côté, le Gouverneur et le Père Hyacinthe étant toujours en mésintelligence, Monsieur le Gouverneur écrivit une lettre à Messieurs de la Compagnie qui marquait leurs mésintelligences, et qu'il n'avait que du mépris, de la haine et aversion contre le Père capucin, qu'il faisait à son caprice, et ne parlait qu'avec emportement, qu'il ne voulait obéir, mais commander, que c'était un fâcheux, un séditieux, qui prêchait et empêchait
2.308 les habitants d'obéir à ses ordres, ce qui prouve manifestement qu'ils étaient ennemis, et que c'était à qui commanderait; la Justice aura la bonté de voir cette lettre qui est aussi jointe au procès, par laquelle il ne se trouve pas que le sieur de VAUBOULON se soit plaint du suppliant. Mais cependant, comme les peuples et habitants avaient les esprits tout disposés à la haine, et préparée à l'indignation contre Monsieur le Gouverneur pour cause des exactions, violences, pillages, et continuelles menaces qu'il faisait de les faire mettre dans les cachots, et faire pendre sans exception, dont ils étaient tous alarmés, que la plus grande partie ne pensaient qu'à abandonner leurs habitations. Le Père Hyacinthe, profitant du temps ainsi qu'il
2.309 a reconnu, et dit et préparé les esprits pour l'intérêt de Sa Majesté, le bien et le repos de Sa Sainteté, faire arrêter Mondit Sieur le Gouverneur, le conduisit et le fit mettre dans un cachot, et que cela avait aussi, ainsi qu'il le souhaitait, que le mal était trop (puissant ?) pour en pouvoir donner avis à Sa Majesté, et qu'il l'avait arrêté en attendant l'arrivée du Commissaire du Roi, qu'il répondrait de ce qu'il avait fait. Ce bon religieux écrivit aux habitants de St Paul le même jour 26e 9bre 1690 qu'il avait fait mettre Monsieur le Gouverneur dans le cachot pour la sûreté de l'Ile, de notre Roi Très chrétien et invincible monarque, leur ordonnant de se tenir dans leurs maisons, et que ceux qui sermonneraient ou parleraient seraient mis au cachot, comme rebelles au Roi et ennemis du repos et bien public, comme ayant l'autorité,
2.310 Les habitants lui firent réponse le 27e et qu'exécutant ses ordres, ils auraient désarmé quelques-uns, et que ne fallait pas donner la liberté à Paul DÉSIRÉ, et de séparer BIDON et LA CITERNE, pour empêcher toutes communications. Les lettres et les causes et moyens pour lesquels Mondit sieur le Gouverneur fut arrêté sont aussi jointes au procès. La Justice voit donc qu'il n'y a rien du fait du suppliant, mais de celui du Père Hyacinthe qui commandait et donnait ses ordres, ni rien à imputer au suppliant qui était un commis proposé pour la Royale Compagnie des Indes de Bourbon. Sans qu'il [ soit ?] d'objecter quétant dans le magasin, monsieur le Gouverneur lui donna des coups de canne, et qu'il s'en alla trouver à Ste Suzanne le Père Hyacinthe, où
2.311 il se fit conduire par Arzul GUICHARD, qui fut menacé de l'avoir fait, où étant, ne trouvant de maison où manger, ROYER, ainsi qu'il l'a déclaré, lui fit offre de sa maison, où étant, ledit Sieur Gouverneur écrivit audit ROYER qu'il eût dit au suppliant ( de ) retourner à St Denis, et que s'il en faisait difficulté, que ledit sieur ROYER l'eût fait conduire à St Denis, pieds et mains liés, où il retourna suivant lesdits ordres, avec le Père Hyacinthe et des ouvriers que le Gouverneur renvoya et retint le suppliant en sa chambre, où l'interrogea longtemps. Le suppliant ne connaissait que très peu ledit ROYER dont il épousa la fille plus de trois ans et demie après, ne pensant lors à se marier; et ce ne fut que pour prier le Père Hyacinthe qu'il alla à Ste Suzanne de venir parler au Gouverneur pour faire sa paix avec lui, et non pour faire un complot pour faire arrêter le Gouverneur.
2.312 Il ne mangea pas même chez le Père Hyacinthe, mais en la maison dudit Sieur ROYER. S'il se plaignait d'avoir reçu des coups de canne, cela était naturel, le coup qu'il avait reçu sur la joue lui faisait encore douleur, et paraissait aux yeux de tous ceux qui le voyaient après la messe, dont plusieurs habitants ont parlé, et aussi des coups qu'il reçut du sieur Gouverneur sans l'avoir mérité, ainsi qu'il a dit, puisqu'il ne fit que lui dire que, faisant mettre les marchandises en confusion, cela lui causerait de la peine, n'ayant pas de monde pour se servir, et que se voyant frappé, et monsieur le Gouverneur en colère faisant des menaces pour le faire pourrir dans le cachot, il se retira du magasin sans rien dire ni faire, de son chapeau qu'il tenait à la main, ne cherchant qu'à se retirer doucement pour éviter sa colère et ses
2.313 menaces, bien loin qu'il lui fût tombée la pensée de résister ni répousser lesdites violences, et l'on ne croit pas qu'il y ait aucun témoin assez faux pour avoir voulu déposer que le suppliant eût porter son chapeau contre le nez de monsieur le Gouverneur, qu'il connaissait et craignait trop, et auquel il rendait toutes les obéissances et soumissions possibles. Le suppliant se retirant du magasin et étant allé à Ste Suzanne, ne fit aucune menace ni assemblée d'habitants, aussi toutes les dépositions et déclarations (ainsi que le suppliant prétend) ne le portent pas, les [missives ? ] justifiant qu'il était bien dans son esprit, et étant de retour, n'ayant de quoi vivre, il fut obligé de manger chez les habitants, comme le déclara Robert DU HAL, dès le 9e Xbre 1690.
2.314 Il ne se trouvera pas des témoins qu'il ait fait des assemblées de jour ni de nuit, ni attroupé avec des armes ni paru en aucune assemblée, ni envoyé des lettres audit DU HAL, ne le déclara-t-il pas lorsqu'il donna sa déclaration avec les autres habitants, et si du depuis il a déposé autrement dit un faux témoin qui n'a déposé qu'en haine du suppliant, et pour se décharger. Par sa déclaration dès le mois de décembre 1690, il déclara qu'il vait été averti que le Gouverneur voulait faire tirer sur lui, et qu'il eût pris garde à lui, ce qui put le porter à dire qu'il fallait l'arrêter, mais sans la participation du suppliant ni de son [ conseil ? ] Ledit DU HAL était ennemi du suppliant et le voulait tuer d'un coup de fusil, l'ayant
2.315 couché en joue pour des [fers ?.] que le Gouverneur avait fait prendre chez ledit DU HAL qui n'a pas dit que, sur les plaintes du suppliant ni à sa sollicitation, il ait été arrêté ni qu'il l'ait arrêté, mais il doit avoir dit que le Père Hyacinthe (sur les plaintes des habitants) ordonna à tous ceux de Saint Denis et de Sainte Suzanne, la Compagnie, et aux ouvriers de s'en saisir sans lui faire violence, pour l'envoyer à Sa Majesté par la première occasion, et quand il avait dit qu'il ordonna même au Commis de la Compagnie, cela ne serait rien. Le témoin est un témoin faux, car il ne dit point à quel jour ni en quel lieu ce religieux ordonna de l'accompagner, et aux ouvriers de l'arrêter, il ne se pouvait pas faire que
2.316 un moment il eût entendu les plaintes de tous les habitants des Iles de Saint Denis et de Sainte suzanne, eussent été assemblés, et que le suppliant eût été présent, et que cela eût été présent, et que cela eût été exécuté, ce qui était impossible de faire sur-le-champ et au même moment. Quand ledit DU HAL aurait entendu ordonner auxdits habitants et au suppliant de l'accompagner, ce n'est pas une conséquence que le suppliant eût été présent et accompagné le religieux, aussi lorsqu'il fut arrêté, le suppliant était en son magasin. Si le Père capucin, étant le chef, sur les plaintes des habitants, et défendeur de ceux-ci, (et non sur aucune plainte que le suppliant ait fait) ordonna aux ouvriers d'arrêter le Gouverneur (et non par par les ordres du suppliant) c'est
2.317 en quoi il n'y a de preuve que l'on puisse imputer au suppliant pour cette ordonnance, c'est au religieux capucin à se défendre, puisqu'il est le chef, et aux habitants. Le suppliant ( comme non ) eût-il été présent lorsque le Gouverneur fut arrêté, par l'ordre seul dudit religieux, il n'eût pas pu s'y opposer à moins d'être tué sur-le-champ puisque les habitants et ouvriers étaient armés ( ou animés) La présence n'induit pas une complicité en cette sorte d'accusation, ce serait le religieux comme chef qui, de son motif, le fit arrêter, et les habitants qui s'étaient plaints de prétendues menaces, violences, pillages, et exactions, et non le suppliant qui s'en est plaint , mais seulement des coups de canne qu'il reçut, et avec qui il fit sa paix, le Gouverneur
2.318 l'ayant rappelé, et interrogé, depuis quoi il ne se trouvera pas qu'il ait eu affaire avec lui, ni aucune querelle, ni ait été du conseil. Au [suite ?] de se défendre, si le supliant a eu quelque différend avec le Gouverneur, ce n'est que pour lui avoir fait des remontrances de la part dudit HERUY, et des autres ouvriers de la Compagnie, ainsi qu'il se justifie par deux requêtes desdits ouvriers au suppliant et leurs déclaratons contre le Sieur Gouverneur. Le bruit a été couru en l'Ile que le Père avait résolu d'arrêter le Gouverneur dès le mois de septembre 1690, avec les plus fameux habitants de St Paul, afin de l'envoyer en France par l'occasion d'un navire Les Jeux qui partit le 14e dudit mois de la rade de St Paul pour se retrouver en France, emmenant l'équipage d'un navire le St Jean Baptiste qui avait ci-devant fait naufrage.
2.319 Ledit Père a dit plusieurs fois que si le Père Bernardin n'était pas mort, qu'il n'en aurait pas tant souffert du Gouverneur et qu'il lui aurait fait voir bien du ( pays ? ) Le nommé Michel DUGAS, matelot dudit navire naufragé ci-dessus, étant revenu dans le navire Les Jeux en 1697, ne parut point surpris en apprenant ce qui s'était passé au suit du Gouverneur, ayant dit qu'il avait été appris dans le temps qu'il avait demeuré à St Paul le dessein que le Père avait fait de l'arrêter. qu'il est constant que le suppliant a été obligé d'aller aux Indes dans ledit navire Les Jeux en 94 pour se justifier des faux rapports et autres faussetés que le Père, ledit HERUY, sa femme et autres, inventèrent contre lui, ce qui a été cause de la perte de la fortune dudit
2.320 suppliant, étant arrivé en ladite Ile pendant son absence, un navire flibustier qui les a tous enrichis, et principalement lesdits HERUY qui se vantent d'être riches de dix-mille écus, ayant profité du travail et du soin que le suppliant a pris pendant six ans qu'il a été en l'Ile à mettre une habitation en état, dans laquelle furent posés lesdits HERUY au départ du suppliant. Ce n'est pas une désordre nouveauté de voir le désordre qui arrive dans l'Ile, vu qu'il y en a eu en tous temps, et que par ci-devant le Père Bernardin qui y avait demeuré environ onze ans, avait toujours eu l'empire sur Messieurs DORGERET et de FLEURIMONT qui étaient pour lors Gouverneurs, dont on tient qu'ils en sont morts de chagrin, et qu'ensuite, il gouverna lui-même pendant trois ans,
2.321 ensuite de quoi il s'embarqua dans un vaisseau pour revenir en France, où étant, il fut en Cour représenter à Sa Majesté que les habitants le supplient de leur envoyer un Gouverneur et autres raisons, ayant tout dit à son avantage, de quoi nous avons appris le contraire, étant dans une Ile, vu que beaucoup desdits habitants se plaignaient fort de sa conduite qu'avait tenue ledit Père Bernardin, élevant les uns et rabaissant les autres, selon son caprice. Ledit Père Hyacinthe s'est voulu servir d'un exemple qui a par ci-devant arrivé dans l'Ile pour perdre le suppliant, ainsi qu'il en a été averti, qui est que les habitants s'étant trouvés trop gênés par la rigueur d'un Gouverneur, qu'ils avaient ci-devant eu nommé monsieur de LA HURE, posé de monsieur Jacob DE LA HAYE,
2.322 Vice-Roi des Indes en 1671, ils résolurent de le tuer en choisissant un endroit pour se poster où il avait coutume de passer, ce qu'ayant été découvert, ils jetèrent tous la faute sur un jeune homme nommé VERON et le firent fusiller, inventant par leurs faux rapports dont les plus anciens de St Paul sont encore de ce nombre. DU HAL étant un chef du parti des séditieux, pour se décharger, n'est pas recevable à déposer contre le suppliant, et on ne doit y ajouter foi. Marc VIDOTTE, l'un des témoins de l'Ile de Ste Suzanne était un de ceux qui se plaignaient comme se voit par sa déclaration du 21e xbre 1690, parce que le Sieur Gouverneur avait exigé de lui deux cents livres de blé et deux cents livres de riz, dans lequel temps, si le suppliant
2.323 avait été un chef d'un parti, n'aurait pas manqué de le déposer, et ne le faisant aujourd'hui que pour se décharger sur le pauvre suppliant, son témoignage est indigne de foi et non recevable, puisqu'il était des habitants de Sainte Suzanne qui faisaient leurs plaintes contre le Gouverneur parce qu'il avait exigé de lui le prix par force mille cinq cents livres de riz, quatre cochons et une rente de deux cochons, quatre-cents livres de riz, des coqs d'Inde, ce qu'étant, c'est aussi de ceux qui ont porté le religieux à faire arrêter le Gouverneur et émouvoir le peuple, et c'est du faux témoin, cela dit contre sa déclaration, mais comme a
2.324 été dit y ayant de la complicité avec le religieux, tout ce qui dit n'étant que pour se décharger, sa déposition doit être rejetée. Etiennette LELIÈVRE, femme de Jacques HERUY, n'est aussi croyable, c'est une débauchée qui a été chassée de St Malo, et ensuite a resté à la Fosse de Nantes pour maquerellage, de femme perdue d'hommes et de réputation, qui avait été envoyée à Rennes où elle aurait été condamnée à mort sans que son mari la réclamât, et ayant été envoyée aux Iles, elle n'a causé que des désordres et débauches d'hommes et femmes, les procès-verbaux qui sont au procès en sont la preuve qu'elle insultait tout le monde, et même insulta monsieur le Gouverneur, et faisait mille rapports au Révérend Père Capucin, et que ledit sieur Gouverneur en avait voulu abuser en et faisant le voyage, le capitaine voulut
2.325 la faire pendre, et étant ennemie du Gouverneur, elle était contre lui, ce que étant, il ne serait pas juste qu'on lui attribuât de la foi à ses témoignages. Paul DÉSIRÉ, pour se décharger, se trouvant embarrassé pour la mort de LA CITERNE, valet dudit Sieur Gouverneur, qui doit avoir déposé contre le suppliant, qu'il l'avait averti de la part du Père capucin de ne se point mêler dudit Sieur Gouverneur, et que le suppliant l'avait appelé pour commander une chaloupe que le suppliant avait fait faire, ce qui ne prouve rien. Si le supppliant eut quelque commandement, ce fut sans l'avoir recherché, mais à la prière du Révérend Père capucin comme on le fera voir, et ordres des habitants, parce qu'il était Commis pour la Compagnie Royale dont il avait eu direction des magasins. Mais aussi, ils le destituèrent depuis du commandement, et le mirent dans un cachot ainsi que l'on fera voir.
2.326 Le suppliant n'espère pas qu'il se trouve informé qu'il ait pris les [ avis ?], qu'il ait fait assembler les habitants, qu'il ait sollicité l'emprisonnement du Sieur Gouverneur, ni été du Conseil ni de la faction, ni porté les mains comme firent tous les habitants et ouvriers qui faisaient des plaintes continuelles dudit Sieur Gouverneur, mais il n'en est pas de même à l'égard du suppliant, aussi les lettres du Sieur Gouverneur du mois de septembre, peu de temps avant qu'il eût été arrêté, marquent bien que le suppliant lui obéissait et exécutait ses ordres, ne cherchant qu'à s'acquitter de sa commission qui lui donnait de l'emploi, sans en rechercher d'autres. Le Gouverneur ayant donc été arrêté le 20e 9bre 1690, s'il mourut au mois d'août 1692, le suppliant n'en est la cause, et il n'était pas exempt de la mort non plus que les autres hommes, et si l'on en avait voulu à sa vie, il aurait été facile de le faire mourir, mais au contraire, on ne cherchait qu'à le conserver et garder pour l'envoyer en
2.327 France avec les plaintes et déclarations des habitants par les premiers navires, et les mémoires du Révérend Père capucin qui ordonnait et commandait, tant il est vrai que l'on n'en voulait à sa vie. Le Père capucin qui avait pris le suppliant en affection jeta les yeux sur lui pour, en attendant les ordres de Sa Majesté, et la conservation des magasins, et le bien de la Compagnie Royale pour les Indes, lui intima que son caractère et ses fonctions ne lui permettaient pas d'avoir le temps de pouvoir commander, lui faisant entendre que ce serait un service qu'il rendrait à Sa Majesté et à Messieurs de la Compagnie, s'il acceptait le commandement, et que c'était la sûreté des magasins et la conservation des Iles. Enfin, au mois de mars, plus de quatre mois après que Monsieur le Gouverneur fut arrêté et que le Père Hyacinthe avait commandé, les habitants de l'Ile Bourbon s'assemblèrent pour élire et nommer un
2.328 Commandant, ce qu'ils firent pour le service de Sa Majesté et le bien de l'Ile et de la Compagnie Royale, et nommèrent le suppliant qui n'avait recherché cette commission, dont BARRIÈRE, DU HAL et autres étaient du nombre, comme est justifié par l'élection du 4e mars 1691, signée d'eux, qui est au procès, et s'ils ne cherchaient à se décharger, et le Révérend Père capucin, ils pourraient rendre à la Justice de fidèle témoignage de la vérité que le suppliant ne rechercha le commandement, et n'eut aucune part, et ne sollicita aucunement l'arrêt dudit Sieur Gouverneur. Ce peuple n'étant pas facile à commander, le suppliant, voyant que plusieurs se mutinaient et ne faisaient pas état de ses ordres, il leur témoigna qu'ils l'obligeraient de s'assembler, ne pouvant s'acquitter de ce commandement comme ils l'avaient souhaité, et qu'ils eussent à élire entre eux et nommer un commandant, ce qu'ils ne voulurent faire, dont le Révérend Père capucin lui fit une réprimande par une
2.329 lettre, ce qui est justifié au procès. Pendant que le suppliant commandait, il chercha autant qu'il pouvait faire de servir le Gouverneur dont il n'était pas le maître, et même pendant sa maladie, il lui fit ôter les fers et ouvrir les portes du cachot pour lui donner du jour, pour contribuer à sa reconvalescence et conservation de sa personne comme est prouvé par le journal de sa maladie. Le suppliant ne s'arrêta pas à représenter la Justice, les peines et fatigues qu'il eut pendant qu'il commanda, et les ennemis qu'il s'attira, même de ceux qui l'avaient choisi, par la jalousie, la haine, l'aversion qu'ils conçurent contre lui, et leurs esprits désobéissants et menteurs dont les témoins mécontents se sont portés à témoigner par d'injustes ressentiments, pour se décharger et favoriser le Père Hyacinthe, qui, par un étrange changement, conçut de la haine et de l'aversion contre le suppliant qui était plus Commandant de nom
2.330 que d'effet, le Père Hyacinthe commandant qui était toujours animé, le suppliant lui ayant écrity en faveur de mondit Sieur le Gouverneur, depuis qu'il fut arrêté, écrit que le suppliant eût à lui répondre que si Dieu et le Roi permettaient de tirer des coups de fusil à la tête, il y a longtemps qu'on le lui aurait fait; ce qui marque son esprit et que le suppliant lui avait écrit en faveur dudit Gouverneur. Le six mars 1691, le Père écrivit au suppliant que ceux de Sainte-Suzanne avaient soussigné de bon coeur, ce qui fait voir que c'était lui qui disposait des esprits, et celle du 22e xbre 1691 et autres font voir que le bon religieux en voulait toujours au Gouverneur, et qu'il se mêlait de tout, et qu'il veillait à tout, et pour la garde du Gouverneur, comme est justifié par les pièces qui sont induites. Monsieur le Gouverneur ayant ses
2.331 créatures à lui, se voyant arrêté, médita tous les moyens pour sortir du cachot, et résolut que le moyen le plus assuré et facile était de faire assassiner le Père capucin et le suppliant, et pour cet effet, il mit tout en usage par le moyen de Louis LA CITERNE, son valet, pour trouver des personnes pour mettre à exécution ses mauvais desseins de les faire assassiner et tuer de coups de couteau, et pour cet effet, il sollicita Emanuel de MATTES, paul DÉSIRÉ, lesquels et autres recollés et confrontés audit LA CITERNE, et ils le lui soutinrent, et il reconnut qu'il était vrai qu'il avait, par le mauvais conseil de Monsieur de VAUBOULON, il les avait sollicités, et qu'il avait résolu de les faire assassiner et tuer à coups de couteau, par les voix infaillibles qu'ils avaient prêtées, et que s'il n'avait pas été arrêté, qu'il l'aurait fait et exécuté. Ce qui est prouvé et reconnu comme est justifié par les pièces qui sont au procès. L'ordonnance de Henry Henry nous
2.332 porte que la seule que la seule machination et attentat doit être punie de peine de mort, encore que l'effet ne s'y soit ensuivi, et par conséquent, si ceux qui faisaient fonction de juges condamnèrent ledit LA CITERNE à être arquebusé, il n'y a rien qui puisse être imputé pour crime au suppliant. La Justice est suppliée de voir les dépositions des témoins et les reconnaissances et confessions confessions faites par ledit LA CITERNE d'avoir voulu assassiner le suppliant et ledit religieux, et qu'il avait résolu de tuer permièrement le suppliant, et puis qu'il tuerait ledit religieux, et que l'affaire était infaillible, et qu'ils auraient le Sieur de VAUBOULON en liberté, et que ce jeudi 8e jour de mai 1692 qu'il fut prêt de poignarder le suppliant, Jacques BARRIÈRE, Julien ROBERT, DU HAL, témoins et accusés aujourd'hui ont signé comme ayant été des juges. Ayant donc été procédé par les formes
2.333 de Justice et le procès fait et parfait, si ledit LA CITERNE fut condamné à mort, il n'y a de crime, sauf le plus prident admis de la Justice qui puisse être imputé au suppliant qui n'a fait mourir ledit LA CITERNE, il n'était pas des juges, et était le maître de la Justice. Le Père capucin et le Frère son compagnon et le suppliant auraient été poignardés, l'assassinat était prémédité, et la résolution prise par ledit LA CITERNE à la sollicitation dudit Gouverneur qui avait résolu même de livrer les Iles aux ennemis, ce qui aurait été fait, si le Père capucin n'y avait apporté les ordres, et en effet, jacques FONTAINE et autres de la part dudit Gouverneur eurent conférence avec les ennemis dans un vaisseau, ainsi qu'est prouvé au procès. La Justice voit donc si ledit LA CITERNE fut condamné à mort, il fut exécuté par les formes de Justice, pour avoir voulu assassiner
2.334 lesdits religieux et le suppliant, cela ne peut passer pour un crime, sauf le plus prudent admis de la Justice. Il n'est pas sans exemple que ceux qui ont machiné et sollicité à faire des assassinats de ceux ont été punis, aussi les ordonnances le portent formellement, encore que l'effet ne soit ensuivi, il est permis de se plaindre en Justice, et si les Juges ont bien ou mal jugé, c'est à eux à répondre de leur jugement, et cela ne peut être imputé pour un crime au suppliant qui serait mort et les religieux aussi, si LA CITERNE n'avait été arrêté, puisque l'assassinat était prémédité et les résolutions prises pour l'exécution, ce qu'étant, quand pour garantir leurs vies ils auraient fait leurs plaintes, cela était permis et naturel, et parce que LA CITERNE l'avait confessé et la Justice l'a condamné; on veut faire passer cela pour un crime comme si le suppliant et le religieux l'avaient tué.
2.335 Mais on n'espère pas que la Justice se porte à juger que ce soit un crime ni que cela mérite un châtiment. Le suppliant n'est pas aussi coupable de la mort du Sieur Gouverneur, qui mourut d'une maladie; si les Religieux et le suppliant avaient voulu attenter à sa vie, ils n'auraient pas tant attendu, depuis le 26e 9bre 1690 jusqu'au mois d'août 1692 qu'il mourut. Comme le Père Hyacinthe ne l'avait arrêté que pour l'envoyer en France avec les mémoires par les premiers navires qui seraient arrivés à l'Ile de Bourbon, où il ne se trouvera pas qu'aucun navire soit arrivé à l'Ile de Bourbon depuis qu'il fut arrêté jusqu'au temps de sa mort, ce qu'étant, il n'y a rien à imputer au Père capucin qui l'avait fait arrêter pour l'envoyer en France avec ses mémoires et suites de plaintes, et s'il n'avait décédé par une maladie qui lui arriva, que le seul chagrin de se voir arrêté eût pu même lui causer, et dont le suppliant
2.336 ne serait pas cause, puisque ce fut le Père Hyacinthe qui ordonna et le fit arrêter. Le Sieur LEROY qui était son chirurgien ordinaire, le traita depuis le 9e jour du mois d'août 1692 jusqu'à sa mort, il lui administra les remèdes qu'il crut être convenables et y apporta les soins possibles, comme se voit par le journal de sa maladie qui est joint au procès, par le procès-verbal dudit LEROY, chirurgien, qui déclara, dès lors que le suppliant eut avis de sa maladie, qu'il lui fit ôter les fers, et fit tout ce qu'il pouvait faire pour conserver la personne dudit Sieur Gouverneur, et fit ouvrir les portes du cachot pour lui donner du jour et de l'air; et le soir du 14e jour d'août, ayant témoigné à son chirurgien qu'il souhaitait le lendemain parler au suppliant, ce que lui ayant été rapporté, il dit qu'il croit le lendemain, ce qu'il ne peut faire puisque,
2.337 le lendemain, il fut trouvé mort, dont le suppliant fut fort surpris et étonné. Le chirurgien rapporta que l'ayant trouvé mort, il le visita, et qu'il dit qu'il rendait de la matière comme pus par la bouche, et que le suppliant dit audit chirurgien qu'il eût à préparer ce qu'il lui fallait pour faire l'ouverture, dont ayant parlé aux habitants, ils ne le voulurent, disant qu'ils n'y connaissent rien, et qu'il eût fallu avoir d'autres chirurgiens, et le firent enterrer sans faire faire l'ouverture. Il ne se trouvera pas informé que le suppliant lui ait fait donner du poison pour le faire mourir, et les accidents de sa maladie marquent bien qu'il avait les poumons gâtés, et le pus qu'il rendait par la bouche est une preuve certaine qu'il mourut par aucun poison; quoi que ce soit, il n'y a de preuve que le suppliant lui en ait donné ni fait donner, et c'est dont il ne
2.338 peut être soupçonné, et il ne sera jamais présumé qu'il a conçu, voulu, faire mourir, puisque le Père capucin ne l'avait fait arrêter que pour s'assurer de sa personne et l'envoyer en France; aussi le Père Hyacinthe soutient qu'il n'y a de crime, ne l'ayant fait arrêter qu'à l'intention de rendre service au Roi, et pour conserver l'Ile que ledit Sieur Gouverneur voulait rendre et livrer aux ennemis. Le Sieur FIRELIN n'a jamais eu de mauvaises intentions, et le Père capucin ne lui fit accepter le commandement que quatre mois après l'emprisonnement, que parce qu'il lui fit croire qu'en le faisant, il rendrait service à Sa Majesté et conserverait l'Ile; et que c'était le bien et le repos
2.339 des habitants et l'utilité de Messieurs de la Royale Compagnie des Indes. Les habitants ne sont pas faciles à gouverner, ce sont de tous temps des esprits séditieux et rebelles, et faciles à se soulever, et ennemis de ceux qui commandent, la destitution dudit Sieur FIRELIN en fait aussi une preuve constante. Les accusés et témoins, ainsi que l'on a eu l'honneur de l'observer, sont ennemis jurés et déclarés dudit FIRELIN, séditieux et rebelles, complices du Père Hyacinthe s'il y avait du crime, participant et juges de la mort dudit LA CITERNE, auquel jugement il ne se voit pas qu' il ait signé. Il s'est justifié par les déclarations de tous les habitants qui se plaignent dudit Sieur Gouverneur, il ne faut que
2.340 lire celle de Jacques HERUY et d'Etiennette LELIÈVRE sa femme, Robert DU HAL, Julien ROBERT, Jacques BARRIÈRE, Paul DÉSIRÉ et autres, et par conséquent, et de tous les autres habitants parties et complices, le sieur Gouverneur n'ayant été arrêté que sur leurs plaintes et avis qu'ils donnaient qu'il voulait rendre l'Ile aux ennemis. Ces déclarations furent faites incontinent qu'il fut arrêté, celle de Robert DU HAL se voit aux feuillets 8 et 9 du premier livre des déclarations, et celle de Jacques BARRIÈRE est aux feuillets 14 et 15. Jacques HERUY était un des ouvriers engagé pour le service de ladite Compagnie, lequel fit des plaintes comme les autres, folios 14 et 18,
2.341 auquel ledit Sieur FIRELIN devait commander, et Etiennette LELIÈVRE fit aussi ses déclarations, folio 19, disant qu'il la traitait de putain, celles de Julien ROBERT et Marc VIDOTTE sont insérées aux 34 et 40 feuillets. Par les pièces qui sont produites pour l'instruction et le jugement du procès dudit de LA CITERNE, il est justifié que Robert DU HAL, Julien ROBERT, Jacques BARRIÈRE, Marc VIDOT et autres instruisirent et condamnèrent à mort ledit LA CITERNE, et que Paul DÉSIRÉ fut condamné de l'assister à la mort, et est preuve que Jacques FONTAINE est un séditieux et d'intelligence avec les ennemis de la France, et Jacques BARRIÈRE a même épousé la tante du suppliant, cela étant pour constant et véritable, l'on n'espère pas que
2.342 la Justice les reçoive pour témoins, et qu'elle veuille ajouter foi à la déposition de ces témoins contre ledit FIRELIN qui a aussi justifié que jacques FONTAINE, Robert DU HAL, Jacques BARRIÈRE, Julien ROBERT, et autres, se sont révoltés et pris les avis, et ôté le commandement audit FIRELIN, ce qu'étant, il ne se voit pas juste de les recevoir pour témoins ni ajouter foi à leurs déclarations. La Justice voit donc qu'il ne se trouve pas un témoin qui ne soit seulement reproché, et dont le témoignage soit recevable, et partant, il n'y aurait pas de Justice d'ajouter foi à leurs dépositions, étant parties et accusés et ennemis jurés et déclarés du suppliant, qui n'a jamais eu l'intention ni volonté 
2.343 de désobéir ou de contrevenir aux ordres de Sa Majesté, aussi ne se trouvera-t-il pas informé du contraire, et accepta le le commandement en attendant les ordres de Sa Majesté, que pour la conservation des intérêts du Roi, et lui conserver les Iles, pour le repos et liberté publics, et intérêts de Messieurs de la Compagnie dont il avait l'honneur d'être Commis pour la Direction des Magasins, dont il s'acquitta à son possible, avec toute la vigilance et fidélité qu'il le pouvait faire. Si malheureusement un an neuf mois après que le Père Hyacinthe eut fait arrêter ledit Sieur Gouverneur pour l'envoyer en France, n'étant venu de navire auxdites Iles pour l'envoyer, la mort intervint, le suppliant ne fut cause, aussi ne mourut-il que
2.344 comme les autres hommes, soit de maladie ordinaire ou subite et par des abcès qui arrivent, et il est faux (sauf correction) que le suppliant, le soir précédent, fût à se divertir en chantant un Requiem avec les nommés LE ROY et BIDON, puisque ledit FIRELIN était seul, lesdits LE ROY et BIDON ne soupèrent pas, étant chez le nommé TALHOËT où ledit LE ROY était allé pour faire une saignée, ainsi qu'il l'a déclaré par son procès-verbal, ce qu'étant, il y a impossibilité qu'ils eussent chanté ensemble ni que LE ROY lui eût porté à souper le même soir; puisque LE ROY n'y était pas et que ce fut celui qui lui portait tous les jours à manger.
2.345 Si LE ROY chirurgien donna des remèdes audit Sieur Gouverneur, ce n'est du fait dudit FIRELIN, c'était son chirurgien ordinaire qui lui administrait les remèdes qu'il voulut, et il est aussi faux, sauf correction, que le suppliant ait demandé audit LE ROY si le Gouverneur avait pris la médecine, ni que LE ROY lui ait répondu: «oui, le bougre en tient». LE ROY, par son procès-verbal n'a point rapporté lui avoir donné de remèdes médecine, et quand il l'aurait fait, il est à croire que ce n'avait été que pour le soulager, et non un poison, quoi que ce soit ce n'aurait été par son conseil, ordre et participation, et après sa mort, il n'aurait pas dit audit LE ROY qu'il eût à se préparer pour en faire l'ouverture, ce qui ne
2.346 fut parce que les habitants ne voulurent point ni le Père capucin qui l'avait fait arrêter. Si LE ROY, comme il est faux, avait dit à Etiennette LELIÈVRE que fallait donner à cette bougresse du bouillon comme l'on avait fait au Gouverneur, l'on n'en pouvait rien induire contre le suppliant, joint que tout ce que cette mauvaise femme a dit n'a été que par haine et d'injuste ressentiment contre le suppliant, et aussi son mari auquel on ne doit ajouter foi, ainsi quel'on a justifié, et qu'elle a été chassée, et lesdits gens sont à la dévotion du Père capucin qui la choisit pour sa commère, qu'il lui fait dire tout ce qu'il veut, et aussi les autres ayant été gagnés et sollicités pour la décharger, et charger le suppliant des prétendus crimes dont il est innocent.
2.347 Le suppliant doit avoir fait sa paix avec le Gouverneur lorsqu'il fut arrêté, et du depuis, il n'eut parole avec lui, et le 21e 9bre 1690, fête de la Présentation de la Vierge, les habitants avaient fait sonner les cloches pour faire la prière en église comme étant une fête gardée, il fit mettre un habitant au cachot, ce qui fit venir le Père Hyacinthe sur les plaintes des habitants, dont Robert DU HAL était du nombre et toujours des séditieux, et parla en langue arabe audit Père Hyacinthe qu'il excita de faire arrêter, et lui-même alla à Sainte- Suzanne avertir les habitants, disant qu'ils n'avaient qu'à l'arrêter sur sa parole, et qu'il l'enverrait en France. Il est donc faux que le complot et la résolution aient été faits du temps que le suppliant fut prier le Père Hyacinthe, lorsqu'il fut
2.348 puisque ce fut après qu'il eut parti de Sainte-Suzanne pour revenir comme il fit pour faire sa paix, ce que le suppliant n'aurait pas fait s'il avait été du complot et résolution comme on veut lui imposer, aussi ne retourna-t-il à l'Ile de Sainte-Suzanne ayant fait sa paix avec le Gouverneur. Ayant fait sa paix près d'un mois auparavant que ledit Sieur Gouverneur fût arrêté, qui fut le 26e 9bre 1690, et depuis son retour, les pièces produites justifient que ledit FIRELIN était en bonne intelligence, et qu'il obéissait aux ordres dudit Sieur Gouverneur peu de temps avant qu'il eût été arrêté
2.349 comme il fut par l'ordre dudit Père Hyacinthe pour l'envoyer en France, pour par les premiers produits bâtiments qui seraient arrivés aux Iles, mais malheureusement, avec les ennemis, avant leur arrivée aux Iles, il mourut d'une maladie qui dura quelques jours sans que le suppliant y ait aucunement contribué, son grand âge et le chagrin de se voir arrêté pouvait lui causer du mal. Si le suppliant s'était trouvé coupable et qu'il aurait été du parti dont on l'accuse, il n'aurait pas resté près de deux ans après dans l'Ile comme il fit, et ne se serait pas embarqué pour venir en France s'il avait été complice, puisque personne ne l'obligeait à s'embarquer.
2.350 Enfin, s'il y a jamais eu innocent, c'est le suppliant qui n'est coupable ni auteur des crimes qu'on lui veut imposer et le charger, et donc il n'est coupable que parce que le Père Hyacinthe et ceux de son parti le veulent, le faisant publier par leurs émissaires pour rendre les coeurs sensibles, et les préparer à recevoir de funestes impressions sur des faux bruits, et rapports que leurs mensonge et imposture élevaient sous un faux zèle et haine déguisée. Mais la Justice souveraine et élevée ne voudrait pas souffrir qu'un innocent soit accablé sur des rapports des faux témoins ennemis du suppliant, et sur la plainte desquels et par leur complot
2.351 concerté avec ledit Père Hyacinthe, ledit Sieur Gouverneur fut par l'ordre et sur la parole dudit Père Hyacinthe, et à la prière desquels et leurs ordres, il a commandé pour le service de Sa Majesté, et lui conservant les Iles, et pour le repos et la sûreté du public et le bien de la Compagnie Royale dont il était le Commis pour la Direction et, après les avoir commandés, les mêmes lui ont ôté le commandement et jugé ledit LA CITERNE à mort, et par conséquent, parties et juges, et dûment reprochés, et auxquels foi ne peut être ajoutée dont les témoignages ne sont recevables, et mondit Sieur le Gouverneur étant mort sans que le suppliant y ait contribué, mais mort de maladie ordinaire et sans aucune preuve que
2.352 le suppliant l'ait fait mourir, dont il n'a jamais même eu la pensée et dont il n'a été capable, on n'espère pas que la Justice, dans des occasions de cette nature il faudrait des preuves claires comme le jour sur autres témoins que ceux qui ont été enquis, veuille se porter à condamner le suppliant qui est innocent, digne de compassion, et aussi sa femme et ses enfants, pourquoi tant par lesdites raisons que autres qu'il plaira à votre bonté et à la Justice touchée de compassion, il espère être bien fondé à requérir ce considéré. Vous plaise, Monseigneur, déclarer le suppliant innocent des faits dont est question, et ce faisant, ordonner que les portes des prisons lui seront ouvertes,
2.353 et les biens restitués avec dommages et intérêts, ce faisant, il sera obligé de redoubler ses prières et faire justice FIRELIN
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