M. MARCEL CACHIN

	M. Marcel Cachin a hérité politiquement de la haine que la bourgeoisie octroyait hier
bénévolement à son ex-camarade Jean Longuet.
	Le Communisme! les Soviets! Dans nos campagnes, que de braves paysans se signent en
proférant ce sacré nom. Chez les citadins, Marcel Cachin jouit d'une popularité naturelle dans
les groupes extrêmes.
	A Bordeaux, où il est adjoint au Maire, et qui est le berceau de sa fortune politique,
il créa un parti avancé qui lui fit longtemps confiance.
	Professeur agregé, M. Cachin trouva, sur sa chaire, un horizon trop borné, et il se fit
pendant dix ans le propagandiste de la doctrine collectiviste.
	Il savait que son attachement indéfectible à la doctrine n'atténue pas son amour profond
pour son pays, et on rappelait dernièrement ses larmes à Strasbourg, aux côtés de M. Poincaré,
le jour de l'entrée triomphale de nos troupes dans cette ville.
	M. Cachin a son idéal; il l'a prouvé, il a même été emprisonné pour lui, et cette petite
auréole de martyr (si on peut dire) ne fait qu'accentuer la confiance prolétarienne.
	Il est des gens dans la vie qui, au déclin de l'existence, versent dans la modération.
M. Cachin n'est pas de ceux-là.
	Depuis son voyage à Moscou, pour des raisons qui ne regardent que lui, le directeur de
L'Humanité est communiste et il ne s'en défend pas.
	Il ne s'agit plus désormais de rechercher la socialisation des moyens de production,
il faut appliquer à la lettre le programme communiste qui répugne encore assez à la majorité
française imbue des principes de la Révolution: propriété, liberté!
	M. Marcel Cachin est le leader d'une petite phalange qui fait du bruit à la Chambre et
donne du fil à retordre au Président.
	Il ne rate pas une occasion de prendre la parole pour mettre en contradiction les actes
du Gouvernement et les principes des amis d'hier de M. Cachin, soutiens de M. Herriot aujourd'hui.
	M. Cachin est tenu à un effort très vaste et très continu pour faire adopter sa doctrine
extrémiste.
	Jaurès, qui était un très grand esprit, mis au défi d'apporter à la tribune de la Chambre
le plan de la Cité future, s'est dérobé à cette invitation.
	Je ne sais si M. Marcel Cachin, malgré son activité et son talent, trouvera dans son
cerveau le plan que le grand leader socialiste ne put apporter: il lui restera le mérite
d'y avoir cru, car M. Cachin est, paraît-il un convaincu et, par ces temps de scepticisme
politique, en France, on salue volontiers dans un Parti un homme qui à la foi.