Procès Vaubulon

Défense de Michel FIRELIN

2.426

Monseigneur de BECHAMEIL
Chevalier Marquis de NOINTEL, Conseiller
du Roi en ses Conseils, Maître des
Requêtes Ordinaires de Son Hôtel,
Commissaire pour l'exécution de Ses
ordres en Bretagne, et Messieurs
du Siège Présidial de Rennes,


Supplie humblement Michel FIRELIN,
ci-devant Commis pour la Royale Compagnie
des Iles, défendeur et accusé, et autres
défendeurs,

Disant qu'il est justifié dans le 
procès-verbal que fit le Père Hyacinthe,
que ce fut lui qui résolut d'arrêter
le feu Sieur de VAUBOULON, et que sur 
sa parole il fut arrêté sur les plaintes
des habitants par les manières qu'il
avait méditées de tenir en une telle entreprise 

2.427 avec les habitants et ouvriers de l'Ile de Bourbon, lequel procès-verbal qu'il signa et fit signer, entre autres par Robert DU HAL, Jacques BARRIÈRE, Jullien ROBERT, Jacques HERUY et autres qui sont aujourd'hui accusés et témoins, sans le suppliant avoir été à Ste Suzanne où le Père Hyacinthe était depuis le 17e octobre 1690, qu'il fut trouver ledit Père Hyacinthe après avoir reçu trois coups de canne dudit feu Sieur de VAUBOULON pour prier ledit Père Hyacinthe pour faire sa paix avec ledit sieur Gouverneur, ce qu'il fit, et non pour le solliciter et les habitants de Ste Suzanne de faire emprisonner ledit Sieur Gouverneur avec lequel il était
2.428 bien remis lorsque le vingt-six novembre, ledit Père Hyacinthe fit arrêter ledit Sieur Gouverneur par les motifs portés par son procès-verbal portant les plaintes et déclarations de plusieurs habitants de ladite Ile pour l'envoyer en France. Mais malheureusement n'étant venu du depuis des vaisseaux en cette Ile, le dix-huitième août mil six-cent quatre-vingt-douze, ledit Sieur Gouverneur mourut d'une maladie ainsi qu'est prouvé par le procès- verbal de feu LEROY son chirurgien, ce qu'étant arrivé naturellement
2.429 et non par poison, le suppliant est innocent de sa mort. Si le suppliant qui avait la direction des magasins de ladite Royale Compagnie, après plusieurs résistances, fut nommé pour commander dans ladite Ile par les habitants à la sollicitation du Père Hyacinthe, près de quatre mois après que ledit Sieur Gouverneur eut été arrêté, ce ne fut que pour conserver cette Ile et les magasins, et pour le bien et repos du public, n'ayant jamais eu l'intention que de rendre service à Sa Majesté, et ce faisant dont il tâcha de s'acquitter fidèlement.
2.430 Mais cependant, ledit Père Hyacinthe et les habitants, en mil six cent quatre-vingt quatorze, le destituèrent et en nommèrent un autre comme est prouvé au procès, sans aucune haine ni animosité contre ledit Sieur Gouverneur auquel il rendit autant qu'il put de services, même pendant sa maladie, n'en étant pas le maître, puisque ledit Père Hyacinthe l'avait fait arrêter après les résolutions prises avec les habitants de l'arrêter pour l'envoyer en France
2.431 avec les mémoires et écrits de plaintes que le Père hyacinthe fit, et dressa comme se voit au procès, pourquoi ledit Sieur Gouverneur était bien soigné et confessé, bien loin que l'on aurait eu la pensée de le faire mourir, plus de ving-et-un mois après qu'il fut arrêté et emprisonné, dans l'intermède duquel temps il n'arriva de France aucun navire
2.432 ni vec vaisseau par lesquels ledit Père Hyacinthe eût pu envoyer en France ledit Sieur Gouverneur, avec les procès- verbaux et mémoires que ledit Père Hyacinthe avait fait faire qui sont au procès. La Justice voit donc l'innocence su suppliant qui n'a rien fait que par obéissance et à bonne intention de rendre service à Sa Majesté, et lui conserver et défendre l'Ile et pour le bien
2.433 utilité de ladite Royale Compagnie des Indes comme en effet il fit, et ne se sentant aucunement coupable, en mil six cent quatre-vingt quatorze, il alla aux Indes pour rendre raison de sa Commission et s'embarqua pour revenir en France volontairement, ce qu'il n'aurait pas fait s'il s'était senti coupable des prétendus crimes qu'on lui veut imputer aujourd'hui, sur des dépositions de témoins auxquelles on ne peut ajouter foi, comme s'il avait fait mourir ledit Sieur Gouverneur dont il n'est
2.434 coupable, ni aussi de la mort d'un nommé LA CITERNE dont le procès fut fait et parfait par les formes et la Justice ordinaire qui ? en cette Ile, n'y ayant de Juges créés parfait Sa Majesté. Par les ordonnances, ceux qui sont accusés d'avoir voulu assassiner, encore que le fait ne soit ensuivi, doivent être punis de mort et par conséquent étant prouvé et même reconnu par ledit LA CITERNE qu'il avait résolu et comploté de poignarder ledit Père Hyacinthe et le Frère Antoine, et aussi le suppliant, s'il fut condamné à être arquebusé, cela ne peut être imputé pour crime au suppliant. Il n'est pas sans exemple qu'en telle matière, quoique la volonté n'eût été exécutée, des accusés n'aient été condamnés, et en effet la ? d'un abbé ou la ? ayant sollicité quelques particuliers pour maltraiter et assassiner un habitant
2.435 dont ayant été convaincu sans l'avoir exécuté ni même mis en état de le faire fut condamné à mort. Il ne se trouvera pas que le suppliant ait signé la condamnation à mort dudit LA CITERNE, ni que le suppliant ait causé la mort dudit Sieur Gouverneur, et lors, a observé à la Justice que les témoignages de DU HAL, ROBERT, BARRIÈRE, VIDOT, Jacques HERUY et Etiennette LELIÈVRE sa femme, ne sont recevables et qu'ils ont été dûment reprochés, et qu'ils ne se sont portés à témoigner qu'à la prière et sollicitation dudit Père Hyacinthe, pouvant la décharger sur le suppliant, quoique innocent, et lors, a fait voir que c'étaient des séditieux et rebelles, que ce fut sur leurs plaintes que le font Père Hyacinthe fit arrêter ledit Sieur Gouverneur, ? déclarations produites font preuves de cette vérité et qui, eux- mêmes, la raison qu'ils nommèrent le suppliant pour commandant, qu'ils ont signé la condamnation à mort dudit La CITERNE, et qui, comme des séditieux et révoltés, ils destituèrent le suppliant et se saisirent de la plus grande partie de
2.436 affaires et papiers, ce qu'étant on ne doit pas ajouter foi à leur témoignage. Ledit DU HAL est même ennemi du suppliant. Il l'a voulu tuer d'un coup d'arme à feu et pour cet effet couché en joue, et poursuivre le suppliant jusque dans les bois, et il est faux, sauf conviction, que le suppliant l'ait envoyé à Ste Suzanne avec le Père capucin avertir les habitants pour arrêter ledit Sieur Gouverneur, ni qu'il fut présent avec deux pistolets lorsqu'il fut arrêté, et quand il l'aurait vu proche son magasin avec deux pistolets, en une telle émotion populaire, ce ne serait un crime puisque ce n'aurait été que pour conserver et défendre ses magasins. Julien ROBERT dit LA ROCHE est aussi ennemi du suppliant et son procès lui fut fait comme à un séditieux et arrêté pour l'envoyer en France comme il le justifiait, si les
2.437 habitants n'avaient pris les papiers pendant qu'il entrait dans le cachot, et poursuivit le suppliant avec des révoltés jusque dans les bois comme firent les autres accusés et témoins qui ont même signé le procès-verbal qui porte leur reconnaissance avec celle du Père Hyacinthe, que ce fut le Père Hyacinthe qui ordonna de l'arrêter sur la plainte des habitants et non du suppliant, ce qu'étant il est donc faux, sauf conviction, qu'il ait été arrêté à la prière du suppliant. Il ne faut que voir le procès-verbal dudit père Hyacinthe qu'ils ont eux-mêmes signé pour juger que les témoins se confondent d'eux- mêmes, et que ce ne fut à la prière du suppliant qui n'avait point affaire avec ledit Sieur Gouverneur, aussi depuis que le suppliant eut reçu les coups de canne, il avait fait sa paix et n'avait ? que des toiles pour le bien de Messieurs de la Compagnie Royale dont il était le commis, et n'a jamais eu l'intention ni la pensée de rien faire contre les ordres de Sa Majesté et toujours prêt d'obéir lorsque le Sieur Gouverneur lui commandait pour l'intérêt de Sa Majesté et de ladite Compagnie.
2.438 Si le Sieur Gouverneur et ledit Père Hyacinthe furent en mésintelligence, le suppliant n'y eut aucune part, et il se voit dans des copies ou extraits d'une lettre que le Sieur de VAUBOULON écrivit à Messieurs de la Compagnie qu'il leur en fit ses plaintes qui sont attachées à la présente que le suppliant tira d'un ? et dont il n'est saisi des originaux, quoique ce soit le suppliant ne prit aucune part, on trouve différente ou difficulté aussi cela ne regardait-il sa commission, dont il s'acquité autant qu'il put le faire. Si ledit Sieur de VAUBOULON exigea des habitants des sommes indues et et leur fit de la peine et les intimida en sorte que le Père Hyacinthe sur leurs plaintes touché de compassion, et par un esprit de charité, crut bien faire et pour remédier à un plus grand mal, le fit arrêter, c'est dont le suppliant n'a été l'auteur ni la cause comme l'a reconnu ledit Père Hyacinthe par sondit procès-verbal.
2.439 S'il avait un autre esprit, c'est donc le suppliant n'est responsable; et tous les habitants étant hanimés animés, le supp ne pouvait pas s'opposer et sa vie n'étant pas en sûreté, et sont des esprits mutins et rebelles et difficiles à commander, auxquels le suppliant n'eût pas pu résister, et sans doute le père Hyacinthe ne l'eût pas fait arrêter comme il l'a reconnu par sondit procès-verbal, les Iles et les habitants étaient perdus sans qu'il fût arrêté, et ce ne fut pas pour faire mourir ledit Sieur de VAUBOULON qu'il fut arrêté mais pour l'envoyer en France par le premier vaisseau, comme le Père Hyacinthe aurait fait s'il était venu des vaisseaux en cette Ile. S'il y a donc du crime, il serait à
2.440 imputer audit Père Hyacinthe, puisque il le fit arrêter, et l'ordonna ainsi qu'il l'a reconnu par sondit procès-verbal sans intention de désobéir à Sa Majesté, mais pour lui conserver les Iles e le bien et repos du public, ce qu'étant, le suppliant est innocent, et n'espère pas que la Justice veuille se porter sur de faux témoignages témoignages et contre ce qui est porté par ledit procès-verbal, et le condamner, tout innocent qu'il est, et c'est en cette sorte d'occasion où il y a juste sujet de craindre de condamner un innocent comme le suppliant qui n'a eu de mauvaises intentions ni cru bien faire qui méritât aucune peine, et dans cet état, il est plus malheureux que coupable, et est digne de la compassion de votre Justice, qui ne souffrira pas qu'un innocent soit condamné sur de faux rapports et témoignages des ennemis du suppliant, le ?
2.441 Vous plaise voir à la présente attaché un extrait des lettres dudit Sieur de VAUBOULON, et ayant égard aux pièces produites, ordonner que les portes des prisons où il est retenu seront ouvertes et ferez justice. FIRELIN
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