Deux d'HÉBÉCOURT à Saint-Domingue
Le dossier de Louis Amand d'Amiens d'Hébécourt, dans la série 2 YE des Archives de la Guerre, contient un état des
services calligraphié reconstitué par l'intéressé lui-même et daté du 15 frimaire an 13.
On lit qu'il avait alors 32 ans, était né à Tracy-le-Mont (Oise).
- Il était entré au service comme volontaire au Régiment de Provence Inférieure le 1er mars 1787,
- passé au 16e régiment de dragons, instructeur à pied, le 3 mai 1790,
- passé instructeur au 2ème bataillon des Volontaires de la Somme le 30 décembre 1791,
- passé commandant du 2e bataillon de Clermont-Oise le 3 vendémiaire an 2,
- commandant en chef des 2 bataillons de Clermont-Oise réunis par ordre du ministre de la Guerre le 17 brumaire an 2,
- passé aide de camp du général de division Vincent le 15 fructidor an 2,
- entré dans l'administration militaire, armée du Nord et de Sambre-et-Meuse le 10 vendémiaire an 3, chargé par
l'ordonnateur général des guerres BOURSIER du magasin général de la navigation de Sambre-et-Meuse, et de la réunion
des bateaux et mariniers depuis Charleroy jusqu'à Vanloo, pour l'approvisionnement de bouche et le transport des
munitions de guerre destinées au siège de Mastreck, de concert avec le commissaire des guerres CLAUDE, jusqu'au
13 germinal an 3,
- passé à l'armée d'Italie chef de division des équipages des vivres, chargé de la comptabilité le 14 germinal an 3.
- Passé à Saint-Domingue le 28 frimaire an 6 et nommé commissaire des guerres et des classes au Port-au-Prince par
l'agent du gouvernement à Saint-Domingue (Hédouville) le 17 prairial an 6, chargé en chef du service de la revüe des
troupes de l'armée de l'Ouest le 25 brumaire an 7, chargé de mission de concert avec l'adjudant commandant J. GOUIN
près le Gouvernement d'Europe le 20 germinal an 8.
- Repassé à St-Domingue le 13 prairial an 9,
- passé aux Etats-Unis d'Amérique à l'évacuation des petits ports de St-Domingue où il fut chargé du service des
relations commerciales à Baltimore le 14 thermidor an 11 jusqu'au 13 frimaire an 12 qu'il reçut ordre de porter en
France le Traité de la Louisiane (an 12).
Il avait donc fait campagne à l'Armée du Nord, à l'Armée d'Italie et à Saint-Domingue.
On lit : Embarqué le 30 ventôse an 6 sur la frégate La Cocarde partie de Brest le même jour.
Nommé par le général HÉDOUVILLE commissaire des guerres et des classes au Port-au-Prince à l'évacuation des Anglais,
chargé en chef du service et de la revüe des troupes de l'armée de l'Ouest en marche contre les rebelles.
Pris par les brigands à l'arrivée de l'armée aux ordres du général LECLERC, condamné par les brigands à être fusillé
avec 600 Blancs de la ville du Port-au-Prince. Blessé dangereusement au moment du massacre, sauvé par les secours
d'une femme de couleur,
passé consul à Baltimore à l'évacuation des Gonaïves et du Port-au-Prince.
Il fait l'objet d'attestations flatteuses de l'adjudant commandant GRANDSAIGNE, de l'adjudant commandant en chef de
l'état-major de l'armée de Saint-Domingue Christophe J. GUIN, d'officiers du conseil d'administration de Clermont-Oise
et de Joseph BIZOUARD, payeur général de la Marine. GRANDSAIGNE signale les missions d'HÉBÉCOURT aux Gonaïves et
au Môle Saint-Nicolas. Il n'a qu'à se féliciter de ses services aux Etats-Unis. GUIN précise qu'HÉBÉCOURT fut conduit
à la maison d'arrêt à l'apparition de l'escadre de LATOUCHE-TRÉVILLE, avec l'adjudant commandant SABÈS et le
lieutenant de vaisseau GÉMON, envoyés de la division BOUDET
commandant les troupes de débarquement. Pascal SABÈS, adjudant commandant, ex-commandant de la place du Cap,
indique entre autres qu'HÉBÉCOURT et ses compagnons furent conduits par les insurgés à La Croix-des-Bouquets pour
y être massacrés. SABÈS écrit de Bordeaux, le 1er brumaire an 13. L'appréciation de BIZOUARD est aussi très
positive mais plus générale.
À son retour en France, que dire?
Que le lecteur des dossiers de Louis Amand d'Amiens d'HÉBÉCOURT et d'Honoré Augustin d'Amiens d'HÉBÉCOURT, de la série
2 YE, risque fort de mêler leurs biographies.
Étudions un certificat du ministère de la Marine et des Colonies, daté du 26 juin 1814, concernant Augustin d'HÉBÉCOURT.
- L'intéressé est arrivé à Saint-Domingue le 17 septembre 1792, avec le grade d'adjudant.
- Il est lieutenant le 29 octobre 1792,
- chef d'escadron le 20 juillet 1793,
- chef de brigade le 21 août 1796,
- adjudant-général le 21 novembre 1798,
- repassé en France par ordre du capitaine général LECLERC sur le vaisseau Le Swiftsure le 10 novembre 1802, arrivé à
Toulon le 30 décembre 1802,
- remis à la disposition de la Guerre en date du 19 février 1803.
A en juger par les dates, l'ordre précité est un détail sinistre car Augustin d'HÉBÉCOURT aurait été passager du
navire ramenant en France le corps du général LECLERC.
On dispose d'un extrait de l'état original des services de Louis Amand d'Amiens d'Hébécourt de Longuecamp,
"de la famille de Mr de CHAMPEAUX". L'original aurait été envoyé à la chancellerie de l'ordre de la Réunion.
Grâce également à d'autres documents de son dossier, à vrai dire, on sait qu'Augustin est né le 1er mars 1764
à Faverolles près Montdidier de Michel et d'Augustine LE MARCHANT. Ailleurs, son père se prénomme Noël Michel Augustin
et il est conseiller du Roi.
Le fils, Honoré Augustin, le cas échéant Augustin Honoré, fut
- dragon au régiment d'Orléans le 14 may 1782,
- brigadier le 4 décembre 1785,
- fourrier le 1er janvier 1787,
- maréchal-des-logis-chef le 6 septembre 1789,
- adjudant sous-officier le 1er décembre 1789,
- fait officier à Saint-Domingue jusqu'au grade de chef de 1/2 bataillon. Il est resté à Saint-Domingue
jusqu'à l'an 9 où il a été consul intérimaire à Baltimore jusqu'à la ratification du traité de la Louisiane
qu'il a porté en France en l'an 11.
En voici donc un second qui est consul à Baltimore et porte en France le traité de la Louisiane.
Augustin passe ensuite dans le corps des ingénieurs du cadastre de France en 1804, est nommé vérificateur le 1er
janvier 1806, ingénieur-en-chef vérificateur le 1er janvier 1808 et n'a quitté son poste qu'à l'évacuation du
département des Bouches de la Weser. Il a dirigé le levé de plans de 154 communes de 1808 à 1813.
Il est major de cavalerie du Premier Corps Franc du département de la Seine le 21 mars 1814.
Le 21 mai 1814, il postule pour un emploi d'ingénieur géographe ou de major d'un régiment destiné à passer aux
colonies. C'est qu'il est propriétaire à la Martinique et à Saint-Domingue. On lui répond que les postes
d'ingénieurs géographes sont réservés aux polytechniciens.
C'est Louis Amand d'Amiens d'HÉBÉCOURT, apparemment, qui se maria à Orléans en 1815. Le maire de la ville, par lettre
du 5 avril 1815, donne un avis favorable au mariage de Mlle Emelie FOUCHER de LASSERAY, fille de Jean, avocat,
suppléant du juge de paix du 4ème arrondissement, et de Mme LAVAINTE avec Louis Amand Augustin d'Amiens d'HÉBÉCOURT,
major de cavalerie et officier de la Légion d'Honneur.
En tout cas, ces dossiers en partie reconstitués nous valent deux consuls-qui-apportent-en-France-le-traité-de-la-
Louisiane et deux majors de cavalerie donc il convient donc d'approfondir encore la biographie.
Aux Archives de la Marine existe un petit dossier d'HÉBÉCOURT fils, d'HÉBÉCOURT cadet à l'intérieur du dossier.
Il est commissaire de 2ème classe en l'an 8.
Le dossier contient une lettre du 10 germinal an 10 de COISNON, directeur du collège de La Marche, à Monsieur PONUT
(si j'ai bien lu) chef adjoint du bureau colonial. COISNON demande si le père du jeune d'HÉBÉCOURT est encore en
France. Il n'a pas le cœur de mettre à la rue l'enfant qu'il éduque.
Il souhaite également savoir ce que son Excellence a décidé relativement au petit enfant du rebelle CLERVAUX.
Le dossier du capitaine de vaisseau Jean-Baptiste GÉMON confirme
que l'intéressé était effectivement à Saint-Domingue avec l'armée LECLERC mais ne contient aucune allusion à
l'arrestation évoquée ci-dessus. Il est vrai que, pour épais et complet qu'il soit, ce dossier traite d'une carrière
bien remplie en termes sobres.
En tout cas, aussi bien d'HÉBÉCOURT que SABÈS et GÉMON ont survécu au massacre de la Croix-des-Bouquets.
GÉMON prit sa retraite en date du 1er août 1821.
Le registre 24 Yc 186 (16e Dragons ex-Orléans 1er volume 1786 à ventôse an II) signale D'HÉBÉCOURT Augustin Honoré
Damien, fils de Michel et de feue Augustine LE MARCHAND, né le 1er mars 1764 à Faverolles par Mondidier juridiction
dudit lieu.
- Il est à la Compagnie CADIGNAN par levée le 1er juin 1787,
- à la Compagnie d'HUMIÈRES le 6 septembre 1789 État-Major,
- engagé le 14 may 1782,
- rengagé pour 8 ans à compter du 14 may 1790,
- brigadier le 4 décembre 1785,
- fourrier le 1er janvier 1787,
- maréchal-des-logis en chef le 6 septembre 1789,
- adjudant le 1er décembre 1791,
- fait officier à Saint-Domingue.
Pour l'amour de la Caraïbe, notons dans le même registre
- Auguste DUBOURBLANC, né le 5 7 1774 à Chateaulandrin, district de St-Brieuc,
- PAUCHET (?) 6e Compagnie, qui s'est engagé pour trois ans le 29 12 1792, était à l'hôpital du 17 prairial an 9, rayé pour trop longue absence le 28 brumaire an 10.
Dans le registre 187 (16e dragons du 4 germinal an II au 1er fructidor an XII,
- Auguste Du BOURBLANC est fils de François et d'Anne Angélique GIGON, né à Château-Leaudrin (Côtes-du-Nord)
le 5 7 1774, rayé des contrôles, rentré le 3 nivôse an 10, déserte le 5 thermidor an 12, jugé le 12
contradictoirement et condamné à 11 ans de travaux publics et 1500 francs d'amende, mort à St-Quentin aux travaux
publics le 5 brumaire an 13.
- Le registre signale aussi Nicolas HARDIVILLER (Hardivilliers), fils de Nicolas et de Marie Rose MÉNARD,
né le 24 août 1785 en la commune de Noyère, arrondissement de Clermont de l'Oise, volontaire le 13 nivôse an 11,
déserteur le 6 ventôse an 11, rayé le 1er germinal an 11
- Jhe Charles Victor D'HARDIVILÉ, fils de Marc Antoine et d'Élisabeth de la FONTAINE, né le 29 décembre 1771 à
Campremé, arrondissement de Clermont de l'Oise, conscrit de l'an 9, engagé le 12 nivôse an 11
- Jean Louis Laurent MAGNIER, fils d'Alexandre Antoine et de Barbe DUBOIS, né le 11 août 1776 à Réunion-sur-Oise,
district de Vervins, 2e Cie du 6e escadron, 8e Cie, 5e Cie, sort des chasseurs francs le 10 germinal 2e année
ci-devant Légion du Nord, brigadier fusillier le 18 juin 1792, maréchal-des-logis le 6 nivôse an 4, en chef
le 13 floréal an 6.
Louis Amand d'HÉBÉCOURT s'étant enrôlé dans le régiment de "Provence-Inférieure", consultons le registre 14 Yc 5
(4e rgt d'infanterie Provence 1786 à an XII).
Il y est, Louis Amant d'HÉBÉCOURT, dit Lavolonté, né le 25 août 1772 à Tracy-le-Mont, juridiction de Noyon en
Picardie, de Noël Michel Augustin et de Thérèse LONGUECAMPE. Il était de la compagnie BOURNET, engagé le 3 mai 1788,
déserteur le 13 juillet 1789.
S'était engagé le même jour, dans le même corps, son frère Alexandre Michel D'Amiens d'HÉBÉCOURT, dit Lapensée,
né des mêmes le 1er avril 1771, à Tracy-le-Mont. Alexandre Michel fut aussi de la compagnie BOURNET, Tilly le 20 mars
1791, fourrier le 20 3 1791, sergent le 7 avril 1792.
Pierre BAUDRIER
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