Ceci est le second ouvrage réalisé par l'Association Connaissance de Challes à qui j'ai décidé d'ouvrir mes pages. Ce deuxième ouvrage porte sur la guerre 14/18.
Je vous laisse le découvrir.
L'hôpital temporaire Fougerolle N°172 bis
Liste des militaires morts pour la patrie
Citation du sergent Vuillermet François
Conséquences de la Guerre pour Challes les Eaux
Novembre 1998
Au printemps de cette année 1998, le Secrétariat d'État aux Anciens Combattants, par l'intermédiaire de Monsieur Patrice BERTHAULT, Directeur Départemental en Savoie, nous faisait connaître son souhait de voir organiser, dans chaque département, des manifestations à l'occasion du 80ème anniversaire de l'armistice de 1918. Notre association -Connaissance de Challes et de ses environs- était contactée car le Casino de Challes les Eaux fut transformé, dès 1914, en hôpital militaire. Une exposition relative à ces établissements sanitaires devait être montée. Elle ne vit pas le jour.
Nous avons alors pensé qu'il serait bon, dans le cadre de nos recherche, de réunir dans une plaquette les renseignements que nous pourrions trouver concernant notre commune au cours de cette période. Cela n'a pas été facile tant d'années après ces évènements, mais nous avons trouvé beaucoup de disponibilité et de gentillesse parmi les personnes les plus anciennes de la localité. Ainsi nous remercions
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Mesdames: |
Georgette FOSSOUX et Jeanne MAURIN |
Ainsi que |
Messieurs: |
Joseph COUTER et Jean ROCHEFRETTTE |
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pour leur témoignage. |
Un document intéressant figure au centre de cet ouvrage. C'est la photo du banquet des Anciens Combattants et Mobilisés, en 1923, à l'Ermitage, café-auberge situé derrière l'établissement thermal, chemin du Sous-bois, appartenant à la famille David. Un long travail de reconnaissance à été nécessaire, fait principalement par
Messieurs: |
André BATARDIN |
Mesdames: |
Thérèse JAY (famille DAVID) |
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Roger CAILLE |
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BELLIN |
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Jean COUTER |
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Denise DORDOLO |
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Joseph COUTER |
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Marie-Louise BEAUMONT |
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Jean CRISTINA |
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Henri DUISIT |
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Alexis DUMOLLARD |
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Marcel MOLLARD |
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Adrien RINCHET |
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Pierre GACHET |
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Edmond GARIGLIO |
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Le Président,
Roger DUMOLLARD.
La défaite de 1870, suivie de l'annexion de l'Alsace-Lorraine par l'Allemagne, laissait aux français un goût amer. Sans doute le ressentiment de revanche était-il à l'état latent. Cependant, depuis plus de 40 ans, la France était en paix et la population s'en trouvait bien. Naturellement, il y avait toutes sortes de problèmes locaux, nationaux et diplomatiques. Mais on ne pensait pas être pris dans la spirale infernale qui approchait. En juin 1914, l'été était déjà là et personne ne pensait à un conflit international immédiat.
Et pourtant, le dimanche 28 juin, deux jeunes serbes de nationalité autrichienne et résidant à Belgrade, GAVRILOVIC et PRINZIO, assassinent, à Sarajevo, l'héritier présomptif du trône austro-hongrois, l'archiduc Francois-Ferdinand de HASBOURG et son épouse la duchesse de HOHENBERG. Le premier lance une bombe qui blesse deux officiers de la suite et, un peu plus tard, le second tire deux coups de feux à bout portant, les tuant presque instantanément.
La spirale tragique se mettait en route. Après un mois de mouvements diplomatiques divers, la cascade de déclarations de guerre commençait, due au jeu des alliances. Ainsi, le 1er août 1914, dans l'après-midi, la population apprend la mobilisation de l'armée française. Comment a-t-elle réagi? Pour beaucoup, ce fut la surprise. A l'époque, seuls les journaux donnaient des nouvelles. Fallait-il encore les lire pour suivre les évènements! En ville on était assez bien informé, mais les campagnes, à ce moment de l'année, le travail des champs battait son plein. Et puis, la Bosnie-Herzégovine c'était loin!
L'image d'Épinal décrivant les soldats partant dans l'enthousiasme, la "fleur au fusil", ne s'est sans doute réalisée que quelques jours plus tard. Dans un premier temps, la population à reçu la nouvelle de façon grave et sérieuse, accompagnée d'une certaine résignation. De toute façon, cela ne devait pas durer longtemps. Le sentiment dominant voulait que la France ne fût pas agressive, elle se défendait. Les propos étaient plutôt du genre: "Allons-y carrément et battons les une fois pour toutes, qu'on ne parle plus d'eux et que nos enfants soient au moins délivrés de cette menace perpétuelle."
D'ou cette expression bien connue et profondément ressentie:
-"C'est la der des der."
L'appellation de "Grande Guerre" ne vint qu'après le constat des résultats catastrophiques qui en découlait.
19 MAI 1912 | ||
Maire: | PERROTIN Claudius | |
Adjoints: | ROUX Antoine | DUISIT Charles |
Membres: | VUILLERMET Gabriel | CHAMBON Benoît |
DAVID Benoît | BACCARD Antoine | |
DUISIT Jean | PERNET Ernest | |
DUMOLLARD Antoine | VIAL Joseph | |
JEANNET Aimé | BRUN Marie | |
10 DÉCEMBRE 1919 | ||
Maire: | PERROTIN Claudius | |
Adjoint: | DUISIT Hugues | |
Membres: | PERNET Ernest | VIAL Joseph |
JEANNET Aimé | BACCARD Antoine | |
DUMOLLARD Claude | CHAMBON Benoît | |
FLUTTAZ François | DUMOLLARD Anthelme | |
VUILLERMET Gabriel | PERROTIN Joanny |
On sait que les combats du début de la "Grande Guerre" furent sanglants et que les autorités ont été surprises par l'afflux des blessés. Les hôpitaux militaires existants et prévus dans le plan de mobilisation ne suffirent plus. D'autre part, le congrès de Vienne et le traité de paix de 1815, après la chute de Napoléon I, prévoyaient une zone neutre, protégeant la Suisse, qui englobait le département de la Haute-Savoie et une partie de celui de la Savoie dont la ville d'Aix les Bains.
Ces dispositions privaient les autorités de possibilités importantes de création de nouveaux hôpitaux en se servant d'infrastructures existantes: hôtels, écoles, etc... C'est ainsi que la Savoie dût faire face à l'arrivée de très nombreux blessés, le cas d'Aix les Bains étant d'ailleurs réglé favorablement dès le début septembre 1914.
Enfin, l'esprit patriotique jouant, certains établissements furent ouverts, issus d'initiatives privées. L'État payait bien un prix de journée, mais il ne suffisait pas!
C'est dans ce contexte que fût crée "l'hôpital temporaire FOUGEROLLE n° 172 bis" de 100 lits dans le casino de Challes les Eaux.
Par lettre du 5 septembre 1914, Monsieur le Préfet demande à monsieur l'ingénieur REULOS "de bien vouloir transporter gratuitement par le tramway les diverses fournitures nécessaires à cet hôpital". Son ouverture eût lieu le 7 septembre.
Le même Préfet par lettre du 17 septembre 1914, remercie Monsieur Marius FOUGEROLLE d'avoir bien voulu "s'intéresser aux malheureux blessés et d'avoir pris la direction de l'hôpital de Challes les Eaux."
Le Docteur VINCENT, médecin oto-rhino-laryngologiste attaché à notre station était mobilisé à cette "ambulance militaire". Il semblerait cependant que cet établissement n'eût pas une grosse fréquentation. Une délibération du Conseil Municipal fait état, par moment, de "moins de trente convalescents".
Ainsi par lettre du 1er décembre 1916, Monsieur le Sous-secrétaire d'État au service de Santé militaire donne "avis favorable" à Monsieur le directeur du Service de Santé de la 14ème Région pour la "fermeture de l'hôpital bénévole 172 bis peu utilisé en raison de son éloignement et dont la réorganisation dans de nouveaux locaux serait difficile et onéreuse pour le Service de Santé.
Entrés en guerre en 1917, il fallait bien leur trouver des lieux où passer leurs permissions. Challes les Eaux en fit partie. Ils ont été accueillis à bras ouverts du fait de leur grande gentillesse. Les enfants ont profité des bonbons et du chocolat et les commerces de leurs dollars! Aucun incident n'a été signalé dans notre commune. Pourtant, en une année, 6000 d'entre eux sont passés à Challes les Eaux.
Référ. Photo | Prénom Nom | Profession | Adresse |
1 | Joseph GARIGLIO | Hôtelier | "Belvédère" |
2 | François DETRAZ | Jardinier | Hôtel du Château |
3 | Jean DROGE | Cultivateur | Chemin de la Combe |
4 | François COUTER | Cultivateur | Rue du grand Barberaz |
5 | Alphonse DUISIT | Cultivateur | Rue Pasteur |
6 | Claudius BEAUMONT | Comptable | Chambéry |
7 | Hugues DUISIT | Cultivateur | Rue de l'Aviation |
8 | Dr VINCENT | Médecin | Rue Charles Pillet |
9 | Ernest PERNET | Menuisier | RN 6 |
10 | Claudius PERROTIN | Cafetier | Rue Charles Pillet |
11 | Hugues VIAL | Cultivateur | Rue Jean Moulin |
12 | Joanny PERROTIN | Cultivateur | Rue Jean Moulin |
13 | TOURNIER | Chef de musique | Chambéry |
14 | Claude COUTER | Garde champêtre | Rue Charles Pillet |
15 | Louis DUISIT | Boulanger | RueCharles Pillet |
16 | Henri DUMOLLARD | Cultivateur | Rue de la Fruitière |
17 | Pierre BARLET | Cultivateur | Rue Pasteur |
18 | Marius COURRIER | Cultivateur | Chemin du Burdet |
19 | Joanny COURRIER | Facteur | Le Puy |
20 | Barthélémy DUISIT | Cultivateur | Chemin Saint-Vincent |
21 | Jean Nicolas PERROTIN | Cultivateur | RN 6 |
22 | Benoît CHAPPERON | Cultivateur | Rue de l'Aviation |
23 | Ernest FERROUD | Menuisier | RN 6 |
24 | Louis CRISTINA | Maçon | Rue Pasteur |
25 | DEMATESSE | Le Chaffat | |
26 | Pierre BALLY | Charpentier | Chemin du Burdet |
27 | Jean BARTADIN | Cultivateur | Impasse de la Loi |
28 | Antoine COUTER | Cultivateur | Rue du Grand Barberaz |
29 | François DUISIT | Cultivateur | Rue Marceau |
30 | François ROZAZ | Cultivateur | La Viager |
31 | François COUTER | Employé tramway | Le Puy |
32 | Francis SADOUX | Garagiste | Avenue Domenget |
33 | Marie NOIRAY | Boucher | RN 6 |
34 | CADOUX | Cultivateur | Rue Pasteur |
35 | Louis DROGE | Cultivateur | La Bresse |
36 | François BARLET | Cultivateur | Rue Pasteur |
37 | Benoît PERRAUD | Buraliste | Avenue Domenget |
38 | Stéphane TETAZ | Cultivateur | Ancienne mairie |
39 | Hugues EXCOFFON | Cultivateur | Chemin du Burdet |
40 | Antoine GACHET | Cultivateur | Le Puy |
41 | Jean BURDIN | Cultivateur | Le Chaffat |
42 | FEUILLEBOIS | Instituteur | École communale |
43 | Joseph VIAL | Cultivateur | Rue de la Fruitière |
44 | Joseph EXCOFFON | Cultivateur | Rue Pasteur |
45 | Germain FERROUD | Cultivateur | RN 6 |
46 | Claudius MOLLARD | Garde champêtre | Rue Clémenceau |
47 | PILLET | Garagiste | RN 6 |
48 | Charles BRETON (Durbet) | Cultivateur | RN 6 |
49 | Émile FERROUD | Menuisier | Le Puy |
50 | Anthelme DUMOLLARD | Cultivateur | Chemin du Burdet |
51 | François PERNET | Cultivateur | Triviers |
52 | Louis CAILLE | Cultivateur | Route de Saint-Baldoph |
53 | Joseph GROSJEAN | Cultivateur | Route de Saint-Baldoph |
54 | Henri COLIN | Épicier | Rue de la Fruitière |
55 | Louis DUISIT | Cultivateur | La Viager |
56 | Raoul LAPEYRE | Hôtelier | Hôtel de France |
57 | Claude BACCARD | Cultivateur | Rue Victor Hugo |
58 | Mathurin MATHE | Comptable | Avenue Domenget |
59 | |||
60 | François FLUTTAZ | Hôtelier | Rue Charles Pillet |
61 | Paul PONCET | Menuisier | RN 6 |
62 | |||
63 | François BALLY | Menuisier | Rue Clémenceau |
64 | François DUISIT | Cultivateur | Rue de la Fruitière |
65 | Marie MOLLARD | Cultivateur | Le Puy |
66 | |||
67 | Francisque GROSJEAN | Cultivateur | Route de Saint-Baldoph |
68 | Joseph BRETON(Durbet) | Cultivateur | RN 6 |
69 | Henri BRETON(Durbet) | Cultivateur | RN 6 |
70 | Benoît CHAMBON | Cultivateur | Rue Victor Hugo |
71 | Joseph PORRAZ | Cheminot | Rue de la Fruitière |
72 | Félix DUMOLLARD | Cordonnier | RN 6 |
73 | Louis RINCHET | Cultivateur | La Viager |
74 | Joanny PORRAZ | Cultivateur | Rue Victor Hugo |
75 | DAVID (Grand-père) | Propriétaire | Ermitage |
76 | Claudius DAVID (fils) | Ermitage | |
77 | DAVID (Grand-mère) | Ermitage | |
78 | Pérone BICHET | Serveuse | |
79 | Marie DAVID (Fille) | Ermitage | |
80 | Gabrielle DAVID (Gaby)(Fille) | Ermitage | |
81 | |||
Nous avons ajouté les personnes ci-dessous que nous savons avoir été Anciens Combattants ou Mobilisés. Il en manque peut-être. Nos moyens ne nous ont pas permis de le savoir et, si tel est le cas, nous nous en excusons auprès des familles. |
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82 |
Joseph DETRAZ |
Wagons-lits |
La combe |
83 | Claude DETRAZ | Wagons-lits | La Combe |
84 | Georges DETRAZ | Militaire | La Combe |
85 | Joseph BEAUMONT | Buraliste | Le Puy |
86 | Joanny DETRAZ | Cultivateur | Rue de l'Ancienne Mairie |
87 | Lucien DUMOLLARD | Postier | Avenue Domenget |
88 | Antoine BACCARD | Cultivateur | Avenue des Thermes |
Mme Georgette FOSSOUX (Mlle LAMBERT, née en 1908)
Je n'avais que 6 ans en 1914 et pourtant je me souviens très bien du départ de mon oncle François EXCOFFON. Il était très enthousiaste. "On les aura" disait-il. Le pauvre a été tué un mois après. Un de ses camarades de Curienne a ramené certaines de ses affaires à sa mère dont un porte-monnaie contenant une pièce de 20 francs en or qu'elle lui avait donnée lors de son départ. Je l'ai toujours.
À l'école, j'étais dans la classe de Mlle MOLLARD, qui s'est mariée ensuite avec l'instituteur M. FEUILLEBOIS. Elle nous faisait chanter des chants patriotiques. Mais une autre institutrice, Mme PAOLI, dont le fils avait été tué, s'abstenait complètement de ce genre d'exercice.
À la campagne, nous n'avons pas trop souffert des restrictions, sauf pour le sucre à cause de l'indisponibilité des champs de betterave du nord. Nous en étions à la saccharine.
Par contre, il y avait des réquisitions. nous faisions moudre notre blé à Chignin et une partie de la farine était automatiquement retenue. De même, notre plus belle vache, la "Marquise", avait été acheté par les services du ravitaillement.
Le casino avait été transformé en hôpital, apparemment surtout pour des convalescents. M. FOUGEROLLE, le dirigeait. Je pense que ce monsieur venait de l'est. Certaines femmes avaient été embauchée pour laver les capotes de ces soldats au lavoir de Triviers. Ces habits étaient plein de poux.
À partir de 1918, ce même établissement a reçu des américains en permission. Il y avait beaucoup de noirs. Tous étaient très gentils. Les enfants des écoles étaient parfois invités à venir goûter. C'est là que j'ai mangé pour la première fois du chocolat à la menthe.
L'atmosphère de la commune était naturellement plutôt triste. Certaines femmes étaient en grand deuil noir, comme cela se faisait. Les hommes portaient un large brassard noir. C'est le Maire, Mr PERROTIN, qui était chargé de transmettre les mauvaises nouvelles aux familles.
Madame Jeanne MAURIN (Mlle DETRAZ, née en 1904)
J'ai été marquée par le fait que ma mère pleurait souvent. En effet, trois de mes frères étaient à la guerre: Georges, Joseph et Claude.
Nous attendions les nouvelles avec anxiété et nous allions presque tous les jours à la poste (à coté du restaurant Savoyard) où Mr Louis PERROTIN nous accueillait gentiment. Malheureusement notre attente était souvent vaine.
Deux de mes frères, Joseph et Claude ont été blessés et en sont morts par la suite. Nous sommes restés 8 mois sans nouvelles de Claude qui avait été fait prisonnier. Ce sont des amis suisses qui ont fini par retrouver sa trace.
La solidarité entre habitants était certaine et les femmes remplaçaient les hommes absents.
C'est le Maire, Mr PERROTIN, qui avait la charge difficile d'annoncer les morts aux familles.
À l'armistice, les cloches ont sonné. Nous sommes descendus à l'arrêt du tram en dessous de chez nous, à la Combe. Tout le monde s'embrassait, connus ou inconnus.
Monsieur Joseph COUTER (né en 1904)
Je me souviens tout particulièrement du 11 novembre. Nous étions en champ vers la grande Pia (rue Jean Moulin). Les cloches se sont mises à sonner. Alors nous nous sommes dirigés vers le village. Tout le monde s'embrassait. C'est ainsi que nous avons appris que c'était enfin fini.
Monsieur le docteur Jean ROCHEFRETTE (né en 1899)
Je n'étais pas à Challes à cette époque, mais plus tard, mon confrère, le docteur Vincent, m'a dit que des soldats français convalescents étaient envoyés à Challes les Eaux dans le cas ou leurs blessures cicatrisaient mal ou trop lentement. L'eau sulfureuse permettait une guérison plus rapide au point que, parait-il, on disait aux soldats: "Attention, si vous allez à Challes, vous repartirez plus vite au front!!"
Le 25 avril 1915, le Maire écrit au docteur Vincent, mobilisé à l'ambulance militaire installée au casino, pour lui demander de bien vouloir soigner gratuitement les familles de mobilisés de la commune. La réponse du 3 mai stipule que ses soins ne seront dispensés qu'aux familles figurant sur la liste d'assistance gratuite. Le Maire écrit alors au préfet que la situation du docteur Vincent, classe 1895, est un "privilège facheux". L'affaire en est restée là.
Cet exemple est donné pour montrer combien la population était attentive à tout ce qu'elle considérait comme un passe-droit.
Le 2 février 1921, le Conseil Municipal choisit les architectes FORAY et PLANCHE. Le monument doit s'élever sur la place de l'église. Estimation: 10 000 F. Financement: quête, subvention d'État, emprunt.
Un comité est formé: Claudius Perrotin, Maire (Président), Joanny Perrotin et Anthelme Dumollard (secrétaire et trésorier)
Dames quêteuses: Mmes Benoît Chambon, Hugues Duisit, Paoli, Debauge, Brun, Aguettant, Vincent et Fluttaz.
Résultat: Souscription et vente: 6983 F; Frais de fête: 2196 F; Reste 4787 F; Plus casino (prévision): 1500 F.
Par la suite il a été décidé que des concessions gratuites seraient accordées aux morts à la guerre.
Le 17 août 1923, il est proposé la construction d'un caveau pour les soldats dans le nouveau cimetière. Coût: 5194 F, financé par le prix des concessions.
A signaler que le 16 novembre 1922, la commune de Challes les Eaux verse 100 francs à la ville de Chambéry pour "l'érection d'un monument dédié aux enfants de la Savoie tombés au Champ d'Honneur".
PÉPIN Jean | DROGE Pierre |
JEANNET Louis | DUISIT Joseph |
EXCOFFON François | HYVREUX François |
DAVID Pierre | GENEVIER Pierre |
DUISIT Henri | COUTER Jean-Victor |
VOIRON Maurice | MOLLARD Alfred |
QUÉNARD Marcel | VOIRON Claudius |
RIVIÈRE Francisque | BONNET Jean |
HYVREUX Jean-Louis | AMBLARD Marcel |
BONNE Victor | PORRAZ Pierre |
BEAUMONT Benoît | PAOLI Paul |
VERROLET Joseph | EXCOFFON Jean |
DAVID Émile | VUILLERMET François |
ROZAZ Francisque | COUTER Jean-Pierre |
BICHET Benoît | GILODI Victor |
EXCOFFON Michel | RAVIER Benoît |
VÊPRES François | BEAUMONT Pierre |
TALON Eugène | COCHET Marius |
36 personnes ont donc disparu dans la tourmente. Le pourcentage de pertes en milieu rural est estimé entre 7 et 8% (Jacob-Bellecombette 7,28%) et en milieu urbain entre 2 et 3% (Chambéry 2,98%). Le recensement de 1910 donne 585 habitants pour notre commune. Cela fait environ 6%.
(11 décembre 1918: Ordre de l'Armée, Général GOURAUD).
1
Pour le repos, le plaisir du militaire,
Il est là-bas à deux pas de la forêt
Une maison aux murs tout couverts de lierre,
« Aux Tourlouroux » cest le nom du cabaret.
La servante est jeune et gentille,
Légère comme un papillon
Comme son vin, son il pétille,
Nous lappelons la Madelon.
Nous en rêvons la nuit, nous y pensons le jour
Ce nest que Madelon, mais pour nous cest lamour.
2
Nous avons tous au pays une payse
Qui nous attend et que lon épousera,
Mais elle est loin, bien trop loin pour quon lui dise
Ce quon fera quand la classe rentrera.
En comptant les jours on soupire
Et quand le temps nous semble long,
Tout ce quon ne peut pas lui dire
On va le dire à Madelon.
On lembrass dans les coins. Ell dit : «Veux-tu finir. »
On s figur que cest lautr, ça nous fait bien plaisir.
3
Un caporal en képi de fantaisie
Sen fut trouver Madelon un beau matin
Et fou damour, lui dit quelle était jolie
Et quil venait pour lui demander sa main.
La Madelon, pas bête en somme,
Lui répondit en souriant :
« Et pourquoi prendrai-je un seul homme
Quand jaime tout un régiment.
Tes amis vont venir. Tu nauras pas ma main,
Jen ai bien trop besoin pour leur verser du vin. »
Refrain
Quand Madelon vient nous servir à boire
Sous la tonnelle on frôle son jupon,
Et chacun, lui raconte une histoire,
Une histoire à sa façon
La Madelon pour nous nest pas sévère
Quand on lui prend la taille où le menton
Elle rit, cest tout l mal quelle sait faire
Madelon ! Madelon ! Madelon !
La première est évidemment humaine. Alors que beaucoup pensaient en avoir vite terminé, ce furent au contraire 4 ans de guerre très dure, l'enlisement dans les tranchées et des pertes énormes. Challes les Eaux a sacrifié 36 de ses enfants, plus un certains nombre de blessés. Comme partout, ces hommes en pleine force de l'age ont manqué cruellement par la suite.
La seconde porte sur les projets nécessaires à l'épanouissement de la station thermale. Prenons quelques exemples parmi les plus importants:
Le projet démarre ne 1905. Cette route doit relier l'ancienne mairie à la RN 6 sur 760m. Certains pensent que d'autres travaux seraient plus urgents comme le "tout à l'égout", l'assainissement ou adduction d'eau potable. En 1912, malgré la défection du Conseil Général, la commune prend la décision du financement des travaux. En 1915 on en reparle, mais on reporte l'ensemble après les hostilités.
Le 1er Novembre 1912 "Messieurs PERNET, JEANNET et BRUN sont chargés de convoquer les hôteliers et loueurs de chambres en vue d'un essai de Syndicat afin de donner un essor à la station et de s'entendre pour assurer sa prospérité." Ce syndicat n'a pris son plein fonctionnement qu'après la guerre.
Le 25 août 1912, il est demandé l'étude d'un projet "d'adduction d'eau de canalisations et d'égouts. Il comprend l'achat de la source de Triviers" et la décision est prise le 9 août 1913. Les travaux ne se feront que bien des années plus tard.
Depuis longtemps l'assainissement des marais avait fait l'objet d'attentions particulières. Des travaux de drainage avaient déjà été entrepris. en 1913, 1916 et 1917 le dossier pour "curage de la Mère et de la Boisserette" se met en place. On demande la mise en oeuvre rapide avec emploi des prisonniers de guerre. son exécution ne se fera que bien plus tard.
Le 12 janvier 1913: proposition d'une ligne allant de St-Jeoire Prieuré à Chambéry, en passant par Challes, Leysse et St-Alban. La décision est prise en mars 1914, mais en 1921 elle est remise en cause. La réalisation ne se fera qu'en 1930 sous le nom "d'électrobus".
En 1909, le Ministre de l'Intérieur impose des prescriptions sanitaires rigoureuses qui entrainent des dépenses importantes. En 1912: la commune demande "l'érection de la localité de Challes les Eaux en station hydrominérale et climatique." Après bien des années de tergiversation et de dossiers, c'est le 15 février 1927 que satisfaction sera donnée.
CONCLUSION
On voit que la guerre a stoppé net l'évolution de la commune. le développement de la station demandait des investissements lourds qui n'ont pu être entrepris en temps voulu. Ils le seront entre les deux guerres, mais beaucoup plus lentement qu'espéré.
LE BILAN HUMAIN DE LA PREMIÈRE GUERRE | ||||
Nationalité | Mobilisés | Morts et tués | Blessés | Prisonniers |
Alliés | ||||
Belgique | 267 000 | 13 716 | 44 686 |
34 659 |
France | 8 410 000 | 1 357 800 | 3 595 000 | 510 000 |
Grande-Bretagne | 8 904 467 | 908 371 | 2 090 212 | 191 652 |
Grèce | 230 000 | 5 000 | 21 000 | 1 000 |
Italie | 5 615 000 | 650 000 | 947 000 | 947 000 |
Japon | 800 000 | 300 | 907 | 3 |
Monténégro | 50 000 | 3 000 | 10 000 | 7 000 |
Portugal | 100 000 | 7 222 | 13 751 | 12 348 |
Roumanie | 750 000 | 335 706 | 120 000 | 80 000 |
Russie | 12 000 000 | 1 950 000 | 4 950 000 | 2 500 000 |
Serbie | 707 343 | 45 000 | 133 148 | 152 958 |
USA | 4 355 000 | 116 516 | 204 002 | 4 500 |
TOTAL | 42 188 810 | 5 392 631 | 12 129 406 | 4 094 120 |
Empires centraux | ||||
Allemagne | 11 000 000 | 1 773 7000 | 4 216 058 | 1 512 800 |
Autriche-Hongrie | 7 800 000 | 1 200 000 | 3 620 000 | 2 200 000 |
Bulgarie | 1 200 000 | 87 500 | 152 390 | 27 029 |
Turquie | 2 850 000 | 325 000 | 400 000 | 3 629 829 |
TOTAL | 22 850 000 | 3 386 200 | 8 388 448 | 7 0089 658 |
TOTAL GÉNÉRAL | 65 038 810 | 8 778 831 | 20 517 854 | 11 103 778 |
Nota: Les chiffres précédents sont pour l'essentiel tirés du rapport parlementaire Louis Marin (1920). Selon leur mode de calcul, ils peuvent comporter une certaine approximation.
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